Médias : le maux de trop ?

Marine Moresco
2 Août 2014



Sanctions, menaces, crashs, faillites, guerres, morts... Le champ lexical de la peur berce nos journées, mettant sous le feu des projecteurs l'homme et ses erreurs. Les médias sont accusés de sur-informer, mal renseigner, d'en oublier le bien-être des populations dans leur course effrénée à la recherche de sensations. Pourtant, les médias sont animés des demandes de leur public... Et ce dernier se nourrit davantage de scandales que d'informations banales.


Crédit DR
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Le 9 mai 2014, deux jumelles prénommées Jenna et Jillian se sont données la main à peine sortie du ventre de leur mère. La photographie, empreinte d'émotion, a fait le tour des réseaux sociaux, contrastant avec l'actualité morose qui envahi nos coeurs lourds.

La multiplication des canaux médiatiques depuis les années 1960 rend l'accès à l'information naturel et évident. Copieusement nourrie aux événements animant le monde, l'opinion publique souffre "d'infobésité", et accuse - tel un Zola en colère - les médias de l'empêcher de respirer. A ce titre, le chanteur Stephan Eicher durant la guerre du Golfe clame sur les ondes sa volonté de "déjeuner en paix", et dénonce ainsi mélodieusement le sensationnalisme utilisé par les médias pour attirer de nouveaux lecteurs. Les médias, à l'image d'une entreprise se conformant aux attentes de ses clients afin d'en tirer le meilleur bénéfice, cherchent avant tout à contenter l'appétit pour le sensationnel de leur lecteur. Mi-responsables, mi-victimes, ils coulent à l'encre de l'actualité le spectaculaire qui leur est finalement demandé.

Afin d'éviter la lassitude d'un public qu'ils désirent toujours plus nombreux, les médias s'adonnent à "des cadrages médiatiques". Cette pratique consiste à faire un "zoom" sur des informations jugées comme pouvant satisfaire les lecteurs, accrocher l'oeil des indécis. A l'image de photographes professionnels et amateurs, ils ne capturent que ce qui est à leurs yeux le meilleur. Leur image est, avant même d'être développée, cadrée, interprétée selon leurs exigences et leurs volontés.

Pour séduire, se distinguer, le spectaculaire entre en scène, les médias risquant alors d'imposer aux populations un point de vue, mais classifiant surtout dans l'esprit de leurs lecteurs les enjeux sur une échelle d'importance. A mesure que les sources médiatiques se diffusent et se multiplient, la concurrence s'amplifie, et se développe dans son sillage une culture de l'urgence dans l'espoir de décrocher "le scoop". La manière de transmettre l'information est elle aussi essentielle : les mots employés doivent percuter le récepteur, déclencher en lui de violentes émotions, comme la compassion ou la peur.

La morosité du sur-informé

Les médias tissent le lien entre un monde globalisé et les individus qui le compose. Véritables fenêtre ouverte sur des continents éloignés, ils deviennent de masse à mesure que les océans et frontières ne sont plus des barrières. D'écran ou de plume, les "unes" nous sautent aux yeux, rendant au fil de leurs apparitions le monde peureux. Les faits divers présentés par les médias sont qualifiés par Pierre Bourdieu de "faits omnibus", puisqu'ils sont capables de retenir l'attention du plus grand nombre, tout en demeurant trop nombreux pour être assimilés durablement par la population. 

L'accumulation de ces informations, dépeignant souvent davantage les peines du monde que ses bonheurs, est accusée de rendre ses récepteurs moroses face au défilé de tristesse auquel ils assistent. Le journal de 20h dessine les contours d'un brouhaha sourd, ou chaque individu se sent impuissant, perdu dans un monde trop grand. Pour éclairer d'un sourire cette ambiance mélancolique, se développent depuis une poignée d'année des sites d'informations dédiées au bonheur, à l'image du site 1 jour 1 sourire dont le slogan parle de lui même : "Votre média positif, pour sourire au moins une fois par jour !".

Cette actualité alarmante et étouffante peut, pour être réellement constructive être appréhendé différemment. Le monde n'a visuellement plus de frontières, et à mesure qu'il s'étend les informations se propagent. Les médias, répondant à des exigences d'audience, ne changeront pas. Il appartient à ses lecteurs, ses récepteurs, de n'en prendre que le meilleur, de discerner entre l'utile et le futile.

Les informations servies au public sont découpées, cadrées, et surtout, de nombreux faits parfois beaucoup plus heureux sont volontairement oubliés. Pour éviter cette indigestion de mots, les meilleurs remèdes demeurent un zeste d'esprit critique sur fond de parcimonie médiatique.

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1.Posté par S.k le 15/08/2014 22:33
plus la population mondial prend connaissance de mauvaises nouvelles plus on constatera une depression mondiale collectif .... A mediter !!!

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