Movember : une moustache au service de la bonne cause

16 Novembre 2013



D'ici à la fin du mois, des centaines de milliers d'hommes vont se laisser pousser la moustache pour récolter de l'argent. L'objectif ? Améliorer les conditions de santé des hommes. Une moustache virile fièrement arborée pour afficher son soutien aux hommes victimes des maladies masculines. C'est Movember !


Crédits photo -- DR
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Mercredi dernier, en rentrant de l'université, une curieuse impression m'a saisie. South Clerk Street, une des artères commerçantes d'Édimbourg située dans mon quartier, avait l'air légèrement différente. Dur pourtant d'expliquer pourquoi. Après qu'un homme m'ait tendu une tirelire et demandé d'y mettre quelques pounds, j'ai enfin mis le doigt sur ce qui m'intriguait : la rue était jalonnée de grands costauds chauves arborant marcels blancs, bonnets noirs, rangers... ainsi que des moustaches dont Tom Selleck lui-même aurait été jaloux.

En marchant vite, on aurait pu croire à des repris de justice, ne manquaient que les tatouages sur les biceps. Pourtant, loin d'arborer un air menaçant, l'armée de moustachus s'adressait franchement aux passants en leur agitant sous le nez des gobelets vides. Qui étaient ces hommes qui faisaient le pied de grue le long des trottoirs édimbourgeois ? Un peu troublée, j'ai pressée le pas et suis rentrée chez moi. Le même soir, j'ai appris que 229 931 chauves du même genre ont arpenté, arpentent ou arpenteront bientôt les rues des villes britanniques pour le compte d'une association caritative pas comme les autres : Movember.

Changer le visage de la santé masculine, une moustache à la fois »

Si certains ont certainement eu connaissance du concept Movember, une présentation s'impose néanmoins. Un peu d'étymologie pour commencer : le mot Movember est la contraction de « moustache » et de « november », une combinaison de mots qui paraît un peu absurde au premier abord. Et justement : l'absurde, c'est en partie ce qui a rassemblé une bande d'amis australiens à Melbourne en 2003. L'idée de départ est simple et se veut volontairement drôle : les « Mo Bros », comme ils aiment à se faire appeler, rasent poils au menton, boucs et autres barbichettes le 1er novembre de chaque année en s'engageant à entretenir jusqu'au 31 du même mois une splendide moustache. Attention : l'objectif n'est pas de concurrencer Dali, Charlie Chaplin ou José Bové, mais de récolter de l'argent pour des œuvres caritatives.

Quoi de mieux qu'une moustache virile fièrement arborée pour afficher son soutien aux hommes victimes des maladies masculines que sont le cancer de la prostate ou des testicules ? Non, les Mo Bros ne sont pas que des comiques moustachus : les poils qu'ils se laissent pousser sous le nez sont plus un outil de communication à but caritatif qu'une simple blague potache. À l'origine du mouvement Movember se trouve un constat simple : les hommes prêtent de manière générale moins attention à leur santé que les femmes. Ni une ni deux, les Mo Bros décident de mettre leur moustache au service de la bonne cause afin de sensibiliser les hommes concernant les maladies dont ils peuvent être victimes. De fil en aiguille et grâce à un soutien sans faille de leur famille et de leurs amis, le mouvement parvient à récolter des fonds. Ils seront destinés au financement de programmes de recherche consacrés aux maladies masculines, ainsi qu'à un soutien financier apporté aux hommes victimes de ces maladies. Il faut souligner que les dons récoltés dans chaque pays sont ensuite reversés au pays en question. Comme l'indique, non sans humour, le site officiel de Movember : « il s'agit de changer le visage de la santé masculine, une moustache à la fois ».

Le succès mondial de Movember

Movember : une moustache au service de la bonne cause
Il faut pourtant se rendre à l'évidence : avoir une moustache, aussi fournie soit-elle, ne fait pas tomber l'argent du ciel. Comment faire donc ? Les hommes intéressés par le projet doivent s'inscrire sur le site officiel du mouvement - Movember.com - et obtiennent en échange le statut de « Mo Bro » (pote à moustache). Les Mo Bros se voient vivement encouragés à monter une équipe d'hommes, mais aussi de femmes : les « Mo Sistas » sont plus que bienvenues ! Les équipes disposent ensuite d'un mois pour sensibiliser le plus de gens et récolter de l'argent. À l'ère de Facebook et de Twitter, les réseaux sociaux sont évidemment l'outil essentiel du mouvement : les proches et les soutiens peuvent ainsi suivre la pousse des moustaches en contrepartie d'une somme versée à l'association.

Concrètement, Movember prend la forme de photos Instagram, de collectes dans la rue, mais aussi d'évènements plus ou moins loufoques. La fin du mois de novembre marque ainsi l'apogée du projet : après un mois de bises qui piquent et de moustaches au café, les Mo Bros peuvent enfin se raser ! L'occasion est trop belle pour ne pas célébrer ça : dans tous les pays où Movember a lieu, des soirées aux airs de galas de charité sont organisées. On y élit en vrac l'équipe ayant la meilleure combinaison moustache-déguisement, le Mo qui ressemble le plus à un moustachu célèbre, la Mo Sista de l'année, ainsi que le Man of Movember qui aura la lourde charge de représenter le mouvement dans son pays pour l'année qui suit.

La combinaison « second degré – œuvre caritative » remporte un franc succès : à en croire le site officiel de Movember, l'association aurait réuni près de 170 milliards de dollars depuis sa création il y a dix ans. Et les moustaches ne cessent de faire des petits : en 2012, plus de 1,1 million de Mo Bros et de Mo Sistas vivant dans 21 pays différents ont laissé tomber le rasoir pour la bonne cause. La France a ainsi rejoint le mouvement en 2012.

To be a Mo-Bro or not to be : Movember en Grande-Bretagne

Les Mo Bros sont légion outre-Manche : en 2011, c'est la Grande-Bretagne qui comptait le plus de participants. Les moustachus britanniques ne manquent pas d'idées : les footballeurs et rugbymen des équipes locales se laissent pousser la moustache, les vitrines des pubs et des bars aussi. Récemment, des « Mo runnings » ont été organisés à travers le pays : outre une bonne paire de baskets et pas mal d'endurance, la moustache est bien entendu de rigueur pour ces épreuves de course à pied. Quant aux célébrités, elles ne sont pas les dernières : en 2011, l'acteur Daniel Craig s'est fait remarquer en arborant une moustache fournie peu « james-bondienne ». Cette année, c'est le célèbre chef et star du petit écran Jamie Oliver qui a affiché son soutien au mouvement. Pas de moustache à l'horizon pour le moment, mais un article fort utile sur son blog : la liste des « aliments à éviter quand on a une moustache ». Le cru 2013 des Mo Bros se voit conseiller sans surprise de se tenir éloigné des barbapapas, du cappucino et ... des huîtres. « À moins que vous ne souhaitiez cultiver sous votre nez bien plus qu'une moustache ! ».

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Alice Quistrebert
Bretonne pur beurre cultivant ses racines à l'IEP de Rennes, co – rédactrice en chef du magazine... En savoir plus sur cet auteur