Transgenre : les garçons aussi ont droit aux toilettes des filles – sous condition

Clotilde Lerévérend
19 Juillet 2013



Les questions de genre sont de plus en plus présentes et le droit des transgenres de plus en plus reconnu. Ainsi la Division des droits civils de l’État du Colorado s’est prononcée en juin 2013 en faveur d'un enfant transgenre jugeant qu’il y avait eu discrimination de la part de son école lorsque celle-ci lui avait interdit l'accès aux toilettes pour filles.


February 27th, 2013 | Crédit Photo -- Wild Gender
February 27th, 2013 | Crédit Photo -- Wild Gender
Il y a six ans naissait un petit garçon dénommé Coy Mathis. À ses 18 mois, l'enfant s'est identifié comme une fille. L'enfant agissait selon tous les « standards » féminins reconnus tels que jouer avec des poupées Barbie, s’habiller avec des vêtements de fillette, être attirée par le rose... Pensant d'abord à une phase dans son développement, ses parents ont rapidement compris que ce n'était pas le cas lorsqu'ils ont vu leurs petits garçons devenir de « plus en plus fille » avec le temps. Ainsi, à quatre ans, elle annonce promptement à ses parents que son corps ne lui convient pas : « Quand allez-vous m’emmener chez le docteur pour qu’on me répare et que je devienne vraiment une fille? », leur a-t-elle demandé. Les Mathis ont donc consulté un psychologue, qui détermina qu’elle était effectivement transgenre, c’est-à-dire née dans un corps de garçon, mais s’assimilant à une fille.

Coy se considérant comme une fillette, Coy avait pour habitude d’utiliser les toilettes pour filles de son établissement scolaire. Mais son école le lui a interdit en décembre dernier, forçant Coy à utiliser les sanitaires des garçons, ceux du personnel ou de l’infirmerie. Pour ses parents, cette décision est contraire aux lois antidiscrimination en vigueur dans l’état du Colorado. Ils ont décidé de porter plainte contre l’établissement.

La Division des droits civils de l’État du Colorado s’est prononcée en juin 2013 en faveur de l’enfant, jugeant qu’il y avait eu, dans cette affaire, discrimination de la part de l’école. Selon la Division des droits civils de l’État du Colorado, « le fait de cloisonner un enfant comme étant garçon ou fille en se fondant uniquement sur leur anatomie visible est une approche simpliste d’une question difficile et complexe ». Cette décision de justice est loin d’être anodine : il s’agit en effet du premier jugement aux États-Unis permettant à une personne transgenre d’utiliser les toilettes du genre auquel elle s’identifie.

Les questions de genre sont de plus en plus présentes de nos jours, bien qu'elles se posent depuis plus longtemps dans les pays anglo-saxons qu'en France. Ainsi pouvons-nous rappeler, entre autres, l'histoire des enfants n'ayant pas de noms pour les « protéger » de l'influence du genre (voir article ). 

Par conséquent la lumière est aujourd'hui sur les transgenres, de plus en plus « compris ». Il est donc important d'expliquer ce qu'est un transgenre, afin de supprimer toutes idées reçues ou tous préjugés. Il s'agit de personnes dont le genre – l'identité psychique et sociale reliée aux concepts d'homme et de femme – entre en conflit avec leur sexe biologique. Un homme transgenre se ressent et s'identifie à un homme bien qu'il soit né avec des organes sexuels femelles. À l'inverse une femme transgenre se ressent et s'identifie à une femme bien qu'elle soit née avec des organes sexuels mâles.

Plutôt « transgenre » que « transsexuel »

Notons enfin que le mot transgenre est un néologisme apparu d'abord au Québec. Il serait un calque du mot anglais transgender, après qu'on eut commencé à utiliser le mot « genre ». On préfère généralement le terme transgenre à celui de transsexuel, car ce dernier est ambigu. En effet être transgenre n'a pas à voir avec la sexualité, c'est-à-dire l'hétérosexualité ou l'homosexualité, tel que le terme transsexuel pourrait suggérer, mais avec le sexe, c'est-à-dire le genre qui est le ressenti psychologique et social de la personne.

Il y a peu de pays au monde qui acceptent de faire une modification du sexe inscrit sur l’état civil à la demande de la personne intéressée. En effet à l'heure actuelle seule l'Argentine autorise le changement de manière libre et gratuit sans contraintes médicales, car le pays respecte les critères définis par le document international appelé « les principes de Jogjarkata ».Quant à l’Espagne, le Royaume-Uni, le Portugal et l'Uruguay ils ne l'autorisent que pour motifs thérapeutiques après expertises médicales et psychiatriques. Enfin l'Allemagne, l'Afrique du Sud, l'Autriche, la Hongrie, la Nouvelle-Zélande, et la Suisse ne l'autorisent eux que pour motifs thérapeutiques avec obligation de fournir une preuve de modification corporelle définitive tels que la chirurgie esthétique ou les traitements hormonaux de longue durée.

Pour la plupart des autres pays, notamment la France, le changement n'est autorisé qu'après une ablation des organes génitaux. Une telle opération peut sembler barbare, d'autant qu'elle conduit à une stérilisation et on peut s'interroger sur sa pertinence. En effet, pourquoi demander à une personne qui veut changer de sexe de se faire opérer ? En quoi subir une opération aussi lourde est-elle indispensable à la reconnaissance par la société du sexe ressenti ? Enfin il existe un certain nombre de pays qui n'autorise tout bonnement pas le changement d’état civil.

Néanmoins, pour revenir à notre affaire, on peut s'interroger sur l'âge auquel un enfant peut réellement s’identifier comme transgenre. Peut-on être véritablement d'un autre sexe psychologique à 6 ans ou n'est-ce qu'une inclinaison vers des attitudes reconnues comme plus féminines ?

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