Turquie : la censure d'internet continue

Öykü Yağmur Karadeniz
11 Février 2014



Après un débat sur une limitation de l'accès à internet, concernant son contrôle par l’Etat, une série d’amendements a été adopté mercredi dernier à l’Assemblée. Malgré le non des trois partis de l’opposition, les députés de l’AKP ont une nouvelle fois réussi à faire entendre leurs voix.


© Reuters
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Les autorités gouvernementales seront donc autorisées à bloquer un site internet, sans avoir besoin d’une décision de justice. En cas de problème, la présidence des télécommunications (TİB) pourra se tourner vers le pouvoir judiciaire. Si un site internet est considéré comme dangereux « pour la vie privée », il sera fermé. Ce projet de loi était présenté dans le cadre d’un changement des mesures pour la protection des mineurs, du respect de la vie privée et de la défense de certaines valeurs. Un prétexte pour rendre la jeunesse plus conservatrice ? Certains y voient plutôt une volonté de censurer les sujets et autres débats anti-gouvernementaux.

Ce projet de loi n’est pas le premier. Youtube avait déjà été bloqué pendant deux ans. Il y a 8 ans, une loi avait été adoptée pour bloquer l’accès à plus de 40 000 sites pornographiques, entre autres. Aujourd’hui beaucoup de blogs et de sites de partage de vidéos subissent le même sort. Le projet prévoit que les opérateurs soient contraints de supprimer « le contenu interdit » dans les quatre heures qui suivent, ajoutant à cela une amende jusqu'à 44 500 dollars. Ce projet de loi oblige les fournisseurs d’accès internet à conserver les données des utilisateurs pendant deux ans.

Contre-attaque suite à l’opération anti-corruption

Apres les événements de Gezipark en Turquie, les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter ont vu leur popularité grandir d’un coup. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan a estimé que les réseaux sociaux étaient « dangereux et utilisés par les extrémistes ». Ces changements sont une manière pour le gouvernement de rappeler sa présence constante après avoir été éclaboussé par une affaire de corruption. Affaire lors de laquelle , tous les documents et autres enregistrements téléphoniques de l’enquête étaient disponibles sur internet. En Europe, ces réglementations ont beaucoup fait réagir. Le gouvernement turc nie toutes ces accusations et affirme que ces mesures sont simplement un moyen nécessaire pour protéger la vie privée, les réactions de l’Occident sont « démesurées ».

Pour Martin Schulz, Président du Parlement européen, « c’est un pas en arrière pour la liberté de presse ». Stefan Füle, Commissaire chargé de l'élargissement de l’Union européenne affirme lui que « cette loi entraîne de grands problèmes. Le peuple a plutôt besoin de plus de transparence, plus d’information, et de moins de limitation ».

Un journaliste expulsé

Les Turcs sont inquiets de savoir que les journalistes ou n’importe quel autre utilisateur de Facebook ou Twitter ne pourront plus s’exprimer librement. Mahir Zeynalov, originaire d’Azerbaïdjan, journaliste pour le Today’s Zaman, a été expulsé en raison de ses tweets anti-gouvernementaux. Il avait écrit : « Les procureurs turcs ordonnent à la police d’arrêter les membres d’Al Qaïda mais les chefs de police nommés par Erdoğan refusent d’obéir ». 

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