Au Kirghizstan, Halloween c'est chic et exotique

Aigul Turdukulova pour FranceKoul.com
2 Novembre 2013


La fête d'Halloween n'est pas une tradition kirghize. A Bichkek, elle gagne en popularité tous les ans. La nuit d'Halloween, les jeunes citadins branchés se métamorphosent en petits diables et en seigneurs démoniaques. Peintures et meurtrissures sanguinolentes sont au rendez-vous. Les filles jouent, pour un soir, à être à la fois belles et horribles.


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Comme la plupart des fêtes traditionnelles, les origines de cette célébration sont lointaines. Halloween était déjà célébrée chaque 31 octobre dans les îles anglo-celtes. D'origine chrétienne, elle serait, selon la majorité des sources, un héritage de la fête païenne de Samain célébrée à la même date par les Celtes comme une sorte de Nouvel An. Très populaire en Irlande, en Écosse et au Pays de Galles, Halloween est introduite en Amérique du Nord avec l'arrivée massive d'immigrants irlandais lors de la Grande famine au XIXe siècle.

Principalement célébrée dans les pays anglo-saxons, la fête d'Halloween a récemment fait son apparition en Russie et dans les anciennes républiques soviétiques. Malgré son immense popularité dans le monde, Halloween reste encore exotique et insolite au Kirghizistan. La situation évolue peu à peu. Les jeunes veulent la célébrer, et à Bichkek, la fête d'Halloween fait désormais partie du programme obligatoire des boîtes de nuit et des centres commerciaux.

Les motivations des organisateurs sont principalement financières. Halloween attire la clientèle et rapporte beaucoup d’argent. Cette nuit-là, la vente d’alcool et de cigarettes fait un bond. Selon Galina Kim, directrice artistique de la boite BarBar, la soirée rapporte 30 % de plus qu’une soirée habituelle, même si les coûts sont élevés : 150 000 soms (2300 euros) pour la décoration de salle, 700 soms pour chaque costume du personnel. Elle souligne qu’elle s'y prépare depuis trois semaines. « Je travaille dans ce domaine depuis cinq ans. Halloween devient plus populaire chaque année à Bichkek et tant mieux », note Galina Kim. Le directeur de la boîte Fabrique, Bektur Oskonaliev, précise qu’il a fait appel à quinze animateurs qui lui coûtent de 1500 à 9000 soms (entre 25 et 140 euros). Il a également fait venir des danseurs professionnels et un DJ de l'étranger. « Je prépare des cadeaux », ajoute-t-il. « J’achète vingt citrouilles, je découpe la forme et mes mains gardent leur odeur toute la soirée ».

Un business lucratif

L'événement devient de plus en plus populaire et l'intérêt commercial dépasse le cadre des lieux festifs. Beaucoup de décorations et de déguisements peuvent être trouvés en magasin. Selon la vendeuse du magasin de costumes Feiya, Oksana, la majorité des clients réserve leur costume une semaine à l'avance. Le prix de la location varie de 350 a 3000 soms (de 5 à 45 euros). La différence de prix dépend du degré d'élaboration du costume.

D'autres endroits branchés marquent également le coup, les 31 octobre et 1er novembre. À l'image des résidents de l'espace de co-working Aiperi Technology qui se retrouvent au Fabulous Bar, du centre commercial Tach-rabat Ball de Monster qui offrent des cadeaux ou encore du Bar Barcode qui offre un menu citrouille. Même certaines écoles, comme Kamkoorduc, profitent de l’occasion pour faire un coup de pub et attirer de nouveaux étudiants, en lançant un concours du meilleur costume. À la clé : un mois d'enseignement gratuit.

Le public visé par les clubs et autres institutions représente un cercle relativement réduit, mais fortuné, de jeunes Kirghizes attirés par le modèle américain, étudiants pour certains à l'Université Américaine d'Asie Centrale (AUCA), et venant d’un milieu plutôt favorisé. C'est donc une opération marketing réussie !

Et dans le fond, pour ces jeunes, peu importe les raisons de cette célébration, qu'elle vienne du Kirghizstan ou de la lointaine Amérique. C'est une nouvelle excuse pour faire la fête.