Gambie : coup d’État manqué et répression sanguinaire

6 Janvier 2015


Depuis la tentative de coup d’État menée par des ex-soldats de l’armée gambienne contre le président Yahya Jammeh le 30 décembre dernier, la situation des gambiens semble pouvoir basculer à tout moment. Depuis les premiers instants de 2015, la Gambie craint que les foudres du leader ne s’abattent sur ce petit pays au système politique déjà complètement clos. Retour sur l’issue d’une révolution ratée.


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Rien de bon ne s’annonce en Gambie depuis les dernières heures de 2014. Dans la nuit du lundi 29 au mardi 30 décembre, des anciens soldats gambiens ont opéré une tentative de coup d’État dans le palais présidentiel à Banjul, la capitale du pays, alors que le président Yahya Jammeh était en visite privée à Dubaï aux Emirats Arabes unis. Selon des sources militaires gambiennes, un commando de sept hommes lourdement armés serait arrivé en pirogue à Marina Parade, sur la corniche est de Banjul où se trouve le palais présidentiel, et auraient ouvert le feu sur les forces de sécurité présidentielle. Le groupe de soldats a finalement été neutralisé. Trois hommes auraient été tués lors de l’attaque selon un bilan non officiel, notamment le leader du groupuscule Lamin Sanneh, un ex-capitaine et déserteur de l’armée gambienne. Les autres révolutionnaires sont toujours en fuite. 

Selon l’AFP, des soldats gambiens appliquent une vaste opération de porte-à-porte depuis le 2 janvier pour interroger les civils et tenter de retrouver les participants du putsch. Plus d’une dizaine de soldats et de civils auraient été arrêtés par la National Intelligence Agency (NIA), les services de renseignements du pays, connus pour leurs méthodes implacables et souvent radicales. RFI rapporte que les enquêtes menées depuis l’attaque avortée auraient permis de retrouver dans des containers du port de Banjul les plans d’attaques du commando révolutionnaire, ainsi qu’une lourde artillerie d’armes automatiques et d’explosifs. 

A son retour en Gambie, le président Yahya Jammeh a martelé dans un discours à la télévision nationale dans la nuit du 31 qu’il ne s’agissait pas d’un coup d’État mais d’une attaque terroriste de « dissidents basés aux États-Unis, en Allemagne et au Royaume-Uni », et d’ajouter qu’ « il n’y a eu aucune participation d’éléments des Forces armées de Gambie à cette attaque, elles ont été vraiment loyales ». De son côté, Washington a démenti toute implication dans la tentative de renversement du pouvoir : « Le gouvernement américain n’a eu aucun rôle dans les événements qui se sont produits à Banjul » selon un représentant du département d’État. Yahya Jammeh n’a d’ailleurs pas manqué, sans citer de nom, de durement menacer « ceux qui prônent et parrainent un changement de régime par la violence » car ils « le paieront cher ». 

Féroce retour de bâton au lendemain du putsch

Ce coup d’État manqué semble bien être l’élément déclencheur d’un durcissement de la politique menée par le président gambien, déjà connu pour tenir le pays d’une main de fer. Les menaces s’étendent à tout potentiel opposant politique mais également aux journalistes et militants pour les droits humains. Alors que la tension et la suspicion constantes augmentent, quatre soldats gambiens soupçonnés d’avoir pris part au coup d'État ont quitté le pays et se sont rendus aux autorités de Guinée-Bissau selon une source de l’AFP, malgré le démenti par communiqué officiel du gouvernement guinéen de leur présence sur le territoire national. 

Une vague de peur s’est abattue sur Banjul depuis l’attaque. Malgré les tentatives du président de rassurer les gambiens et les encourager à reprendre une « vie normale », la ville semble s’être éteinte alors que les habitants de la capitale restent terrés chez eux et que les commerces et les banques ont fermé leurs portes par peur de représailles. Seules des manifestations de soutien de fonctionnaires et citoyens gambiens au président Jammeh qui ont eu lieu ce lundi 5 janvier semblent animer les rues de Banjul, comme le rapporte la journaliste Aisha Dabo sur son compte Twitter. 

Jammeh, le tyran déguisé ?

La spontanéité de ces manifestations laisse pourtant place au doute. La réputation de Yahya Jammeh va de mal en pis auprès des autres dirigeants africains qui lui attribuent parfois les traits d’un tyran, et dispose de moins en moins d’alliés dans la région. Les répercussions du coup d’État inquiètent de plus en plus la communauté internationale qui craint une recrudescence de la violence gouvernementale et d’un sévère contrôle des libertés des gambiens, alors que toute forme de manifestation à l’encontre du gouvernement de Jammeh est systématiquement réprimée comme le rapporte dans une interview Jibrin Ibrahim, directeur du Centre pour la démocratie et le développement à Abuja (Nigéria) pour RFI.

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Le président autocrate mène d’une main de fer cette ex-colonie britannique indépendante depuis 1965, enclavée au coeur du Sénégal. L’attaque du 30 décembre n’est pas la seule ombre au tableau pour le président : plusieurs tentatives de putsch ont eu lieu depuis qu’il a lui même accédé au pouvoir par un coup d’État en 1994. Yahya Jammeh en est actuellement à son quatrième mandat de président de la Gambie. 



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