L’élection du nouveau Pape va-t-elle changer le monde?

18 Mars 2013


Le nouveau pape vient d'être élu, mercredi 13 mars. L'archevêque argentin Jorge Mario Bergoglio prend la succession de Benoît XVI, introduisant pour la première fois dans l'histoire de l'Eglise catholique la présence d'un pape sud-américain, jésuite et portant le nom de François. Une élection placée sous le signe de la rupture, qui a provoqué la surprise générale dans le monde entier. Elle revêt notamment une grande importance pour les pays d'Amérique latine. En Argentine, le nouveau pape inspire à la fois enthousiasme, prudence et contestation.


« Habemus Papam ». Les 115 cardinaux, réunis en conclave dans la Chapelle Sixtine, ont élu le nouveau pape, après quatre tours de scrutin et deux jours de concertation. La nouvelle, annoncée par le cardinal français Jean-Louis Tauran, s'est accompagnée de l'émission de la traditionnelle fumée blanche et du retentissement des cloches de l'église Saint Pierre. L'ancien archevêque argentin Jorge Mario Bergoglio prend la succession de Benoît XVI suite à sa démission officialisée le 28 février dernier. Il est le 266ème pape de l'histoire de l'Eglise. Sa nomination a provoqué la surprise, bien qu'il se soit déjà placé deuxième derrière Joseph Ratzinger en 2005. Parmi les fidèles réunis sur la place du Vatican, beaucoup ignoraient la nationalité du nouveau pape, comme le rapporte le journal La Nacion. Les Argentins présents sur place ont célébré l'événement dans l'euphorie.

Âgé de 76 ans, le nouveau pape a lui-même opté pour le nom de François — encore jamais porté par ses prédécesseurs — et qui pourrait avoir été choisi en hommage à Saint François d'Assise. Premier pape issu d'un continent autre que l'Europe, sa nomination incarne la rupture. Elle reflète l'insertion des pays émergents et l'importance croissante reconnue à l'Eglise catholique d'Amérique latine. Il est par ailleurs le premier jésuite à occuper cette fonction, signe de réconciliation au sein de l'Eglise catholique. La « compagnie de Jésus », fondée par Ignace de Loyola en 1534, a en effet eu des relations parfois difficiles avec le Vatican.

En Argentine, l'annonce de l'élection du nouveau Pape a fait grand bruit. Les programmes de télévision ont été suspendus pour montrer les images en direct pendant que les réseaux sociaux s'emplissaient de commentaires. Des milliers de catholiques se sont réunis sur la Place de mai à Buenos Aires pour célébrer l'événement. À la maison rose, l'information a été accueillie avec prudence. Le gouvernement kirchneriste a déjà eu plusieurs affrontements avec Bergoglio, l'Eglise et plus généralement le Vatican, notamment sous Jean-Paul II. Comme le rappelle le journal Clarin, Jorge Mario Bergoglio s'était ouvertement opposé à la légalisation du mariage gay en 2010, mesure qu'il considérait comme « une manœuvre du Diable », appelant à une lutte d'ordre politique contre « la destruction du plan de Dieu ». Il s'est de même toujours opposé à la question de l'avortement, actuellement illégale en Argentine.

Sa position conservatrice va-t-elle influencer la vie politique et sociale d'Amérique latine ? Alors que le continent se remet lentement de la mort de Hugo Chavez (plusieurs pays ont observé un deuil national de plusieurs jours), l'élection d'un pape argentin pourrait avoir de lourdes conséquences sur la politique interne et externe des pays d'Amérique du Sud. Elle devrait en effet renforcer le poids de l'Eglise et des partis conservateurs dans des pays où la religion bénéficie déjà d'une influence considérable.

Selon le journal Clarin, le pape François est perçu comme un homme humble et proche du peuple. À peine élu, il a déjà imposé son style de vie, payant sa chambre d'hôtel à Rome pour « donner l'exemple » et refusant d'emprunter la voiture papale. « Il s'est toujours montré très impliqué au service de son pays et de Buenos Aires, explique sa sœur María Elena. Lorsque j'ai su qu'il avait été élu, je ne pouvais pas le croire. Il n'a jamais semblé vouloir vraiment devenir pape. »

Peu après son élection, le pape François a rapidement été accusé dans la presse internationale d'avoir participé à la dictature militaire, ayant sévi en Argentine de 1976 à 1983. On le soupçonne de ne pas avoir soutenu et protégé deux hommes d'Eglise sous sa hiérarchie, détenus et torturés par les militaires. L'information n'est cependant pas confirmée. Elle provient d'une accusation rendue publique en Argentine avec la parution en 2010 d'un article du journal Pagina 12 regroupant une série de témoignages à l'encontre de l'ex-archevêque. Le Vatican dément l'information, et, dans son livre autobiographique, El Jesuita, Bergoglio se défend : « j'ai fait ce que j'ai pu avec l'âge et le peu de relations que j'avais durant cette période de dictature » affirme-t-il.

François Ier célèbrera sa messe inaugurale mardi prochain. Il hérite de la lourde charge de guider les quelques 1,2 milliards de fidèles dans le monde. Il devra par ailleurs affronter la crise actuelle que traverse l'Eglise catholique, critiquée notamment depuis l'affaire Vatileaks ainsi que les scandales ayant éclaté au sein de l'IOR et de la banque du Vatican.



Lorsque l'addiction du voyage rencontre la passion de l'écriture, elles forment un cocktail… En savoir plus sur cet auteur