Le Qatar, nouvel acteur du sport à l’international

Aurélien Sperandio
19 Mai 2015


Depuis une vingtaine d’années, le Qatar utilise le sport pour se faire connaître dans le monde entier. L’organisation d’événements sportifs mondiaux, le rachat de clubs, ou la création d’instruments de communication pour montrer sa puissance à l’international, en sont des exemples concrets. Coup de projecteur sur l’avènement du sport business au Qatar.


Crédit Reuters
L’histoire d’amour entre le sport et le Qatar débute au milieu des années 1990, avec l’accession au pouvoir du cheikh Hamad bin Khalifa Al-Thani, qui prend les commandes du gouvernement en renversant son père. Cette décennie coïncide également avec le doublement de la production de pétrole du pays, et donc un enrichissement rapide. À cette époque, le nouvel émir comprend que le sport est un instrument important pour faire du Qatar une puissance mondiale.

L’objectif est simple : promouvoir le pays comme le premier centre de sport au monde. Pour cela le cheikh décide d’investir de manière importante, avec plusieurs intentions à la clef : construire des infrastructures sportives dignes des plus grandes nations, organiser des compétitions internationales et se doter d’athlètes de haut niveau. Le processus est dès lors en marche.

Tout s’accélère dans les années 2000 avec l’organisation du Tour cycliste du Qatar en 2002, d’un grand prix moto dès 2004 ou encore des Jeux asiatiques en 2006. Les ambitions qataries semblent alors suivre la bonne voie, et le pays rattrape son retard à vive allure. « Nous croyons que le sport peut faire plus que la politique. Organiser des événements sportifs importants, c'est progresser de vingt ans en quelques années », déclarait d’ailleurs il y a peu le cheikh Saoud ibn Abdoulrahman Al-Thani, secrétaire général du Comité olympique. L’objectif est rempli.
Plus de 130 coureurs étaient au départ du Tour du Qatar cette année. Crédit Nicolas Bouvy

Le foot, la com' et l’argent

Grâce à ses ressources naturelles gigantesques, le pays du Golfe peut se permettre de dépenser sans compter dans le sport. Mais c’est surtout le football qui est visé. Dans ce domaine le Qatar se développe sur plusieurs points : l’accueil de grands rendez-vous du ballon rond, l’installation d’un grand championnat local, et l’achat de clubs étrangers comme le Paris Saint-Germain. Et pour prouver sa puissance sportive au monde entier, la chaîne nationale Al-Jazeera Sport créée en 2003 devient BeIn Sport en 2012, et part à la conquête de l’Europe, de l'Amérique du Nord et de l'Asie.

Près de 500 millions d’euros ont par exemple déjà été investis en France dans les droits de diffusion de la Ligue 1 et de la Ligue des champions. Une stratégie marketing mondiale qui s’avère être payante, et qui à coup de millions de dollars semble être intouchable. « Al-Jazeera est un acteur irrationnel économiquement, dont l'objectif est avant tout le rayonnement culturel du Qatar » a déclaré récemment Bertrand Méheut, président du groupe Canal + et concurrent direct de la chaîne de sport qatarie.

Chez lui, le Qatar ne se refuse rien non plus pour montrer sa puissance. Federer, Djokovic ou Nadal voyagent régulièrement à Doha ou Abu Dhabi pour des matches d'exhibition. Le Qatar peut ainsi se permettre de faire venir les plus grandes stars du sport en leur reversant quelques primes alléchantes. Aujourd’hui le Qatar s’est véritablement fait un nom sur la scène internationale, et ne devrait plus quitter le paysage sportif mondial de sitôt.

Un avenir radieux

Le pays du Golfe a d’ores et déjà décroché l’organisation de la coupe du monde cycliste 2016, des championnats du monde d'athlétisme 2019, de la Coupe du monde de football 2022 et se dit proche de finaliser un contrat pour organiser un grand prix de Formule 1. Mais le pays ne compte pas s’arrêter là comme en attestent les propos du secrétaire général du comité olympique qatari : « Après la Coupe du monde et de possibles Jeux olympiques, nous ne nous arrêterons pas, nous allons continuer car nous avons déjà les infrastructures et les équipements ».
L’émir du Qatar, Cheikh Hamad bin Khalifa Al-Thani, aux côtés du président de la FIFA Joseph Blatter. Crédit AFP/Philippe Desmazes

Le Qatar a encore bien des projets pour l’avenir. Cela pourrait notamment passer par l'organisation d'une seconde Coupe du monde de football ou par l'accueil de matches de football de championnats étrangers. Le pays a aussi dans le viseur l’organisation de matches de Premier League qui attirent déjà des millions de téléspectateurs dans le monde chaque week-end.

Et cela ne semble être qu’un début. L’émirat a exporté en 2012 pour plus de 60 milliards de dollars en gaz et pétrole. Cet argent est mis au service d’une vision où le sport a pris une position capitale. Le pays a les moyens d’impressionner le monde du sport durablement. Il a déjà réussi à être finaliste des derniers championnats du monde de handball en janvier 2015, après avoir monté une équipe de toutes pièces et naturalisé une dizaine de joueurs. Le Qatar pourrait donc être un candidat crédible au titre de champion du monde de football en 2022 s'il s'en donne les moyens et si la mayonnaise prend. Et il a les moyens de ses ambitions.