Londres : gare aux poubelles !

15 Aout 2013


Incroyable, mais vrai. Pendant une semaine au mois de juin, dans les rues de Londres, la société Renew a testé des poubelles capables de recueillir des données sur les passants grâce à leurs Smartphones. Retour sur un sale scandale.


Crédits photo -- Renew
À l’origine d’un véritable progrès technologique, la société Renew provoque le scandale et la colère des autorités londoniennes. Pendant les JO 2012, des poubelles « intelligentes » avaient envahi les rues du quartier de la City. Souvent la cible d’attentat, ce quartier d’affaires a privilégié l’installation de ces poubelles conçues pour résister à l’explosion d’une bombe. La City ne se doutait pas qu’elle avait laissé entrer des vide-ordures urbains capables de récolter des informations sur les passants grâce à leurs Smartphones, pour ainsi mieux cibler la diffusion de la publicité.

Des poubelles high-tech pour les Jeux olympiques

Noires, et équipées d’écrans LCD, ces poubelles « nouvelle génération » répondaient tout de même à leur utilisation première. Une fente verte permettait de jeter ses papiers. Une merveille de technologie, mais aussi écologique à 2 000 livres pièce. Conçues pour résister à l’épreuve des bombes, ces poubelles révolutionnaires sont équipées d’un système WiFi et d’écrans digitaux. Publicités, news locales, financières ou mêmes pratiques défilaient sur ces nouveaux supports de communication.

Lundi 12 août, les autorités d’outre-manche ont exigé le retrait de ces poubelles très sophistiquées et dites intelligentes. Soupçonnée de récolter des informations privées, la technologie, dont sont dotées ces poubelles, doit être désactivée en attendant l’ouverture d’un débat public à ce sujet. Les autorités de la City n’ont pas hésité à saisir l’autorité britannique de protection de défense des libertés.

Des déchets aux informations

Pendant une semaine, au mois de juin, la société Renew n’a pas hésité à collecter les données des smartphones des Londoniens. Rien de moins qu’un demi-million de téléphones ont été passés au crible, avec sans aucun autre but que de mieux cibler les campagnes publicitaires en fonction des informations trouvées. Cette nouvelle technologie offre « une vision sans précédent » en analysant « les points d’entrée et de sortie, le temps passé dans un endroit, les centres d’intérêt ». Les poubelles « intelligentes » deviennent alors un outil permettant de proposer des publicités personnalisées aux clients.

Ce scandale éclate quelques semaines après la découverte du XKeyscore, le logiciel espion de l’Agence de la sécurité nationale américaine (NSA), conçu pour étudier les activités des particuliers sur internet. Emails, mots-clés sur les moteurs de recherche, ou encore activités sur les réseaux sociaux, les fonctionnalités du nouvel outil d’espionnage de la NSA permettaient de tout passer en revue. À Londres, ce sont les poubelles qui espionnent les téléphones portables pour pister les habitudes des passants de la City.

Au cœur des critiques, le fabricant Kaveh Memari se défend d’avoir testé un dispositif capable de seulement enregistrer le nombre de passants, sans obtenir leurs données personnelles, à l’image de la technologie utilisée par les sites internet pour comptabiliser le nombre de visiteurs uniques.

Le porte-parole de la City of London a réagi très violemment, « Peu importe ce que peut faire la technologie. Tout ce qui se passe dans les rues doit être fait avec précaution et avec le soutien d'un public informé ». Pour calmer l’opinion publique, Kaveh Memari, à la tête de la société Renew, insiste sur le fait que la collecte et l’utilisation éventuelle de ces informations privées devraient se faire avec l’aide de groupes de protection des données. « Les développements futurs ne dépendront pas seulement de la technologie, mais surtout de la façon dont les gens réagissent vis-à-vis de cette technologie interactive ».

Kaveh Memari n’aura peut-être pas besoin d’attendre longtemps. La capitale britannique a été la première ville à accueillir ces poubelles du futur. Elles seront bientôt commercialisées par la société fabricante Renew dans des villes comme New York, Dubaï ou encore Rio.