Slovaquie : la petite Bratislava

26 Juillet 2013


Trois semaines, six villes. La troisième étape de mon tour Interrail est à Bratislava, capitale de la Slovaquie. Ville sans réputation touristique, cette petite capitale européenne écrit encore son histoire.


Crédits photo -- Laurène Perrussel-Morin
Interrail est l’occasion pour les étudiants baroudeurs de découvrir l’Europe en payant un ticket leur assurant un certain nombre de jours de voyages gratuits. J’ai profité de cette opportunité pour partir, avec une amie et seulement deux sacs à dos, faire un tour partiel de l’Europe centrale. Un voyage sur les traces de l’histoire du Vieux Continent qui nous a permis d’appréhender les différences entre des pays bien vite regroupés sous le terme de « pays d’Europe de l’Est ».

Un voyage très humain

« Il arrive bientôt, ce train ? » Cela fait déjà une demi-heure que nous patientons dans la gare de Břeclav, petite ville de République Tchèque qui est pourtant un carrefour ferroviaire. La pluie n’en finit pas de tomber, et ralentit plus que d’ordinaire les trains polonais et tchèques. Un homme, la cinquantaine, nous ordonne par gestes de partager une bière avec lui. Nous n’avons plus de couronnes tchèques, mais il se fait un plaisir de nous l’offrir.

Notre interlocuteur ne connaît que quelques mots d’anglais et d’allemand. C’est suffisant pour nous parler de la politique de son pays : « Ici, les médias sont tous corrompus. », affirme-t-il. Il mime le cheval et ses œillères dans l’intention de nous montrer que les journalistes tchèques n’ont pas conscience de la situation. La liberté est rognée progressivement par le vote de textes comme le nouveau Code criminel adopté en 2008, qui restreint les droits de la presse lors des affaires judiciaires.

Après quatre-vingts minutes de retard, nous pouvons enfin monter dans le train qui nous emmènera à Bratislava. Notre interlocuteur tchèque parle à tout le monde avec un sourire communicatif. Il raconte son travail dans une pizzeria et évoque son futur mariage avec une Slovaque. Voyant que nous ne comprenons ni le tchèque ni le slovaque, une femme assise dans un coin du wagon commence à traduire les propos de notre voisin dans un français parfait. Installée depuis quelques mois à Cannes avec son fiancé, cette Slovaque se rend elle aussi à Bratislava pour y chercher sa robe de mariée. Après un voyage très humain, nous arrivons à Bratislava à la nuit tombée. Ce n’est que le lendemain que nous pourrons la découvrir pleinement.

Une ville au cœur de l’Europe

Bratislava est très différente de Prague et de Cracovie. Beaucoup plus petite, l’ancienne Presbourg n’est pas prisée des touristes. À Prague, même notre guide d’origine slovaque nous a dit lorsque nous lui avons demandé des conseils de sorties qu’il n’y avait pas beaucoup de choses à voir sur place. Si la Slovaquie est un pays indépendant depuis peu, elle attire depuis longtemps bien des convoitises. Successivement slave, austro-hongroise, tchécoslovaque, république fédérée de la Tchécoslovaquie, et finalement slovaque, la petite capitale de 400 000 habitants savoure aujourd’hui son indépendance.

L’ambiance, méditerranéenne, est un mélange de culture autrichienne et allemande. Après tout, Vienne n’est située qu’à deux heures de Bratislava. Les habitants de Bratislava se prélassent au soleil, dans de petites cours, et mangent des plats copieux à base de pâtes, de choux et de pommes de terre. Les pubs côtoient les restaurants italiens, et même le slovaque semble imprégné des intonations des deux langues. Cette impression a été renforcée, pendant notre séjour, par le soleil radieux qui a remplacé la pluie de la veille.

Nous découvrons la ville, qui nous paraît étrangement calme. Le nez rivé sur notre plan, nous nous rendons jusqu’à l’église Sainte-Elisabeth. Les églises sont importantes dans cette capitale d’un pays à majorité catholique. Surnommée l’église bleue, l’église Sainte-Elisabeth semble tout droit sortie d’un roman de Lewis Carroll. Cachée derrière un parc, à proximité d’une école, elle a l’air d’avoir été taillée dans un gâteau orné de crème chantilly. Cette église a été construite au début du XXe siècle dans le style Art nouveau hongrois en hommage à l’impératrice Élisabeth qui a grandi dans le château de Bratislava. Ce dernier, en revanche, se révèlera décevant : fermé au public en raison d’une réunion ministérielle, il présente une architecture extérieure assez banale. Nous apprendrons par la suite qu’il a été dévasté par un incendie en 1800, et n’a été rénové que récemment.

Les lieux incongrus de la capitale slovaque

Le soir même, nous découvrons par hasard un nouveau lieu incongru. Affamées, nous entrons dans un restaurant qui nous attire par ses prix relativement peu élevés. Nous sommes obligées de passer par un long corridor. Le restaurant, qui semblait de taille modeste vu de l’extérieur, cache un dédale de pièces toutes plus grandes les unes que les autres. Une serveuse nous explique qu’il s’agit d’un ancien cinéma réaménagé en taverne traditionnelle. Dans un coin de la salle, un pianiste crée une ambiance intimiste malgré la taille de la salle. Nous dégustons des spécialités à base de fromage de brebis, notamment le fameux halusky, qui ressemble aux gnocchis.

En voulant boire un dernier verre avant de nous coucher, nous entrons dans un pub que nous avait recommandé le Tchèque rencontré dans le train. Ce n’est qu’au bout de quelques minutes que nous réalisons qu’il s’agit d’une chaîne, principalement destinée aux touristes. L’ambiance n’en est pas moins réellement intimiste, et c’est l’occasion pour nous de goûter aux bières maison de cette brasserie traditionnelle.

Après deux nuits à Bratislava, nous montons dans un nouveau train direction Budapest. Nous attaquons la deuxième partie du voyage.




Ex-correspondante du Journal International à Berlin puis à Istanbul. Etudiante à Sciences Po Lyon… En savoir plus sur cet auteur