Thaïlande, sanctuaire de la boxe

9 Mai 2015


Dans un pays où la religion et la culture priment, la boxe est intimement liée à la construction de la nation thaïlandaise. Elle rassemble toute la jeunesse autour du même rêve de devenir un grand combattant, et de partager une passion commune. Tous les Thaïlandais la pratiquent au moins une fois dans leur vie. Il s’agit de plus qu'un simple sport : cet art ancien du combat fait partie du quotidien dans le royaume du Siam. Chaque match de boxe fait salle comble.


La boxe thaïlandaise, communément appelée Muay Thaï, est une véritable religion. Ses origines remontent au XVe siècle durant la période du royaume d'Ayutthaya. Cet art martial et sport de combat est profondément enraciné dans la culture thaïlandaise. Il trouve son origine dans les pratiques martiales ancestrales, par exemple dans le Muay Boran qui est la boxe traditionnelle, ou le Krabi Krabong qui se pratique avec des armes.

La boxe thaïlandaise était utilisée pour faire face aux invasions des Birmans. Le peuple du Siam avait mis au point un art guerrier permettant de lutter au corps-à-corps face à un ennemi armé. Selon la légende, le plus célèbre boxeur thaï se nomme Khanom Dtom. C’est un ancien prisonnier de guerre, qui a vaincu une dizaine de soldats birmans en échange de sa liberté lors du pillage de l’ancienne capitale thaïlandaise en 1774. Durant les périodes de paix qui ont suivi, cet art martial est devenu une distraction pour les personnes qui venaient régulièrement assister aux combats entre les soldats. 

De là est née la tradition des paris, coutume solidement ancrée dans les combats de Muay Thaï, même si ceux-ci ne sont pas officiellement autorisés. De part la place qu'ils prennent, les paris clandestins génèrent une économie importante pour le pays. Souvent réputée pour être une pratique violente, la boxe est associée à l’idée que tous les coups sont permis. 

Bien que considérée comme un sport brutal, la boxe répond à un code et à des règles très strictes. Les combats se déroulent en 5 rounds de 3 minutes dans lesquels les poings, les pieds, les genoux et les coudes sont autorisés ; sans oublier la possibilité d’attraper et de projeter son adversaire. Il est également possible de frapper en dessous de la ceinture en évitant les parties génitales, de frapper en frontale, et dans la tête.

Une issue de secours

Presque tous les jeunes qui se lancent dans le Muay Thaï sont pauvres ou orphelins. « Il y a aussi beaucoup d’enfants très jeunes, les parents envoient leurs enfants apprendre la boxe en premier sport comme nous envoyons les nôtres faire du foot ». La boxe est le seul moyen pour eux de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille, et par la même occasion, de se créer une identité sociale auprès des autres. « Il faut savoir que pour les Thaïlandais les plus modestes, la boxe thaï peut être un excellent ascenseur social ».

À partir du moment où le combattant commence à gagner des matchs, sa cote de popularité et sa valeur augmentent aux yeux des parieurs et de leur coach. La victoire est aussi un bonus : une prime augmente à la fin de chaque combat. À l’inverse, si le combat aboutit à un échec, ces avantages s’envoleront aussi vite et il sera difficile pour ces athlètes de rebondir.

C'est un sport qui pousse des personnes en provenance de l’étranger à venir pratiquer en Thaïlande. C’est le cas de Lou, étudiant habitant à Montréal, qui est parti deux mois en Thaïlande dans le but de découvrir et d’apprendre cette discipline à l’endroit où elle est apparue. À la fin de ces deux mois d’entraînement, l’idée principale qui ressort de son discours est en rapport avec le respect et la proximité qui existent entre le Muay Thaï et la religion. « Il y a une statue à l'entrée du club qui représente Naï Khanom, le fondateur du Muay Thaï. À chaque fois qu'un visiteur arrivait, il la saluait en s'inclinant ».

La boxe thaïlandaise comporte plusieurs rituels d'avant combat. Le Wai Khru est la première partie du rituel effectué. Le respect qui existe entre l’élève et son mentor est très grand. Lorsqu’il monte sur le ring avant le début de son combat, le boxeur rend honneur à son professeur et lui exprime sa gratitude à travers une danse.
Arrive ensuite le Ram Muay, rituel qui suit le Wai Khru et précède le combat. Il sert aussi d’échauffement. Cette danse fait appel à des figures légendaires qui ne sont enseignées qu’aux combattants de Muay Thaï. 

Partie intégrante du quotidien des Thaïlandais, l’art des batailles s’est transformé en sport réputé et populaire. De nombreux camps d’entraînement sont répandus un peu partout dans le pays. Les combats sont bien sûr retransmis et diffusés tous les week-end à la télévision thaïlandaise. Chaque dimanche, il est possible d’assister à des matchs de boxe à Chatuchak, ou encore le mardi soir devant le MBK Center. Les deux plus grands stades de boxes sont Lumpinee et Rajadamnoen, tout deux situés à Bangkok. Ils sont administrés par le gouvernement et l’armée royale, qui en assure la sécurité à l’intérieur. Les recettes sont utilisées pour soutenir les différents départements de l’armée thaïlandaise.

Lors des combats, le public est toujours présent en grand nombre. Ceux qui commencent dès l’âge de 7 ans, pour les plus jeunes, génèrent une ambiance survoltée. La musique traditionnelle rythme les combats et l’engouement des spectateurs qu’il y a autour de ce sport.
 
Cette discipline continue de louer et de développer des valeurs telles que le courage, le respect, la concentration. Tous ces aspects très respectueux et codifiés font que la boxe thaï n’est pas simplement et uniquement perçue comme un sport, mais plutôt comme une leçon de vie, un enseignement à suivre au quotidien.



Etudiant en première année de Journalisme à l'ISCPA , passionné de musique. Actuellement… En savoir plus sur cet auteur