Uruguay : découvrez les incontournables de la cuisine uruguayenne

12 Septembre 2013


Nous évoquions, il y a quelques semaines, la tradition avant-gardiste de la société uruguayenne au niveau latino-américain et parfois mondial. Après déjà un mois passé sur ce sol relativement méconnu en Europe, voici venu le temps d’en évoquer les incontournables culturels, véritables marqueurs identitaires…


Crédits photo -- El mate uruguayo
N’importe quel étranger qui se rendra en Uruguay ne pourra échapper ni à une dégustation de viande autour d’un asado, ni à celle d’un dessert au dulce de leche, et encore moins à celle du fameux mate.

LA VIANDE BOVINE : L’INCONTOURNABLE SALÉ

L’Uruguay détient le record mondial du nombre de vaches par personne, soit trois vaches par habitant. Les Uruguayens sont ainsi les plus gros mangeurs de viande bovine dans le monde entier : on estime à 60 kg la consommation de viande par personne et par an. En plus de cela, l’Uruguay est le seul pays au monde à avoir mis au point une technique de repérage par satellite de son bétail, lui permettant d’en observer la totalité. 

La carne ne se savoure pas non plus de n’importe quelle manière. C’est un véritable acte social qui fait l’objet d’une préparation bien particulière et que l’on appelle asado. Les invités se retrouvent autour de cette grillade dont la technique de cuisson est d’exposer les aliments crus à la chaleur du feu de braises et de les cuisiner lentement. L’hôte prépare lui-même ses braises en faisant un feu sur l’un des côtés de la grillade et en plaçant régulièrement les braises qui en tombent sous la viande qu’il fait cuire. Celle-ci se déguste souvent avec des légumes cuisinés de la même façon et ainsi imprégnés d’une odeur succulente de fumé (poivrons, oignons, aubergines…). 

Crédits photo -- primates.ximian.com
Un asado se consomme en moyenne deux fois par semaine, et chaque habitat uruguayen dispose de son propre dispositif de cuisson, même en appartement. La parrilla (grillade) uruguayenne est mondialement reconnue, et l’Uruguay détient même le Guinness Record de l’asado le plus grand du monde (1,5 km de parrilla) !

En plus d’être réputé pour ses asados, l’Uruguay l’est également pour ses empanadas : ces pastels d’origine créole et datant de l’époque coloniale sont aujourd'hui fourrés à la viande et sont consommés en moyenne une fois par semaine. Fris ou cuits au four, il en existe de nombreuses variétés (jambon, fromage, confiture, etc.), et de plus en plus de commerces spécialisés dans la vente exclusive d’empanadas voient le jour en Uruguay.

LE DULCE DE LECHE : L’INCONTOURNABLE SUCRÉ

Un étranger trouvera difficilement du Nutella dans les supermarchés uruguayens. En revanche, il ne saura que choisir parmi toutes les marques de Dulce de Leche.

Cette variante de lait caramélisé ou de confiture de lait est traditionnelle d’Amérique latine. Cependant, chaque pays se l’approprie et lui donne des noms divers : « Dulce de leche » en Argentine, en Bolivie, au Costa Rica, à Cuba, en Paraguay et en Uruguay, « Arequipe » en Colombie et au Venezuela, « Bollo de leche » au Nicaragua, « Cajeta » au Mexique, « Manjar » au Chili et en Équateur, « Doce de leite » au Brésil ». Les recettes varient selon les pays et les producteurs, mais le dulce de leche traditionnel se fait avec du lait de vache, du sucre, de l’essence de vanille et d’une pincée de bicarbonate de sodium pour colorer. Il est en apparence brillant, lisse, marron et crémeux. Cette sorte de pâte à tartiner est utilisée en Uruguay dans de nombreux desserts (tartines, flans, gâteaux, tartes, pancakes), notamment dans ce gâteau traditionnel appelé Alfajor. Les alfajores, d’origine espagnole, datent de l’époque coloniale et sont constitués de deux biscuits ronds l’un sur l’autre généralement au chocolat, fourrés au dulce de leche.

Attention ! Le dulce de leche n’est pas une sucrerie quelconque. C’est un enjeu culturel et économique qui génère des tensions, des rivalités et des polémiques, principalement entre l’Argentine et l’Uruguay. L’origine de cette pâte est incertaine, et chaque pays du continent aime proclamer qu'il en est l’inventeur. En avril 2003 a éclaté une polémique entre les deux pays suite à une déclaration de la Secrétaire de la Culture de la Nation Argentine qui souhaitait déclarer l’asado, les empanadas et le dulce de leche comme patrimoine culturel argentin. En Uruguay, l’opinion publique, les spécialistes de la gastronomie et les milieux politiques s’en sont offusqués et ont fait appel à l’UNESCO pour que ces trois produits soient déclarés patrimoine gastronomique du Rio de la Plata. L’UNESCO ne s’est aujourd'hui toujours pas prononcée.

Cette polémique montre à quel point le dulce de leche est un enjeu important en Uruguay, notamment sur le plan économique : la production intérieure uruguayenne s’estime à 9000 tonneaux par an, soit une consommation moyenne de 3,2 kg par personne; une quantité qui aurait augmenté de 20 % ces dernières années. En plus d’une production intérieure importante, l’Uruguay est aussi un grand exportateur de dulce de leche : 17 000 tonneaux sont exportés par an, principalement en Argentine, au Brésil, aux États-Unis, au Mexique et au Paraguay. Les secteurs formels et informels uruguayens participent de manière importante à cette production, d’où la crainte, du côté uruguayen, de la rivalité argentine qui menace ce revenu national non négligeable. Force est de constater, pour finir, que le dulce de leche fait bien l’objet d’une véritable passion nationale : les classements des 10 meilleures marques par pays ou par région sont régulièrement réalisés.

LE MATE : L’INCONTOURNABLE BOISSON

Peut-être avez-vous déjà aperçu un homme, une femme ou un enfant de n’importe quel milieu social suçotant une boisson chaude dans une paille en métal reliée à un pot arrondi en bois porté sous un bras dont la main tient un thermos ?

Seul un Uruguayen est apte à réaliser un tel exploit acrobatique dans n’importe quelle condition et de manière tout à fait normale. Ne soyez pas étonnés de voir quelqu’un boire son maté tout en faisant ses courses, en conduisant, en se promenant, en étant au cinéma, ou en assistant aux cours. Cette boisson chaude est une sorte de thé débordant de bienfaits naturels que les Uruguayens consomment dès leurs 7 ans et tout au long de la journée. La plante de maté est reconnue pour ses vertus énergisantes (stimulant naturel), ses vertus amincissantes (stabilisateur naturel de l’appétit), et son aide à l’acuité intellectuelle (vivacité mentale), à la réduction de la fatigue, au contrôle du poids, au combat pour les problèmes respiratoires.

Les éléments de base sont le thermos d’eau chaude, l’herbe à maté, la bombilla (paille en métal) et le mate (pot en bois). La préparation fait l’objet de 4 étapes : faire chauffer l’eau sans arriver à l’ébullition ; remplir le maté d’herbes jusqu’aux deux tiers du pot ; couvrir le maté d’une main et agiter le pot pour pouvoir verser un fond d’eau froide dans un des creux engendrés ; introduire la bombilla dans ce creux après l’absorption d’une partie de l’herbe par l’eau froide tout en bouchant avec le pouce l’extrémité qui vous permettra d’aspirer. Une fois ce processus opéré, le sujet peut verser l’eau chaude autour de la paille en veillant à garder une partie de l’herbe sèche. Il ne lui reste plus qu’à boire en remettant régulièrement de l’eau chaude, et à respecter les nombreuses règles de consommation de la boisson : ne jamais demander à gouter le maté de quelqu’un d’autre ; c’est le buveur qui doit proposer de lui-même. Ne jamais tourner la paille dans le maté, elle doit rester bien en place. Ne changer l’herbe que lorsque l’eau du thermos est finie.

Une fois de plus, les rivalités entre Argentins et Uruguayens sont sensibles : un Argentin vous dira que son pays est l’inventeur de la boisson ; un Uruguayen répliquera que les vrais buveurs de maté sont les Uruguayens puisqu’ils y ont développé la technique du thermos sous le bras permettant d’avoir le tout dans un bras et de conserver un bras libre, au contraire d’un Argentin qui n’a pas de thermos et qui consommera davantage le maté chez lui ou dans un salon de thé…

Oui, il s’agit bien d’une philosophie de vie que l’on ne pourra saisir qu’une fois sur place...