Angola : la nouvelle puissance économique africaine

Mathilde Mossard
18 Avril 2013



Pendant longtemps les nouvelles de l’Angola étaient synonymes de guerre civile, de guérillas ou même d’intervention internationale. En 1975, à peine le pays naissait-il qu’il entamait près de trois décennies de conflits internes meurtriers. Pourtant, si Le Journal International s’arrête aujourd’hui sur ce pays, ce n’est pas pour parler guerre mais affaires.


Crédits photo — Reuters
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D’abord, un chiffre qui ne passe pas inaperçu auprès des investisseurs étrangers : 17. C’est le taux de croissance du PIB angolais entre l’année 2004 et 2008. Un vent d’optimisme s’empare du climat économique angolais, lui offrant de réelles perspectives de développement. Si le nouveau millénaire marque un tournant de modernisation pour l’économie angolaise, il clôt avant tout un sombre chapitre de l’histoire nationale.

La fin de la guerre civile : une économie qui voit le jour

Quand en 1975 le Portugal concède l’indépendance à l’Angola, le MPLA (Mouvement Populaire de Libération de l’Angola), d’inspiration marxiste, se place à la tête du pays. Or, d’autres factions politiques réclament le pouvoir et éclate alors une guerre civile qui sera dramatiquement nourrie par les stratégies internationales de la Guerre froide.  En effet, s’affronteront alors, d’un côté le MPLA soutenu par Cuba et l’URSS, et de l’autre, l’UNITA (l’Union Nationale pour l’Indépendance totale de l’Angola), pro-occidentale, recevant l’appui du régime d’apartheid sud-africain et des Etats-Unis. Ce n’est qu’en 2002 qu’UNITA dépose les armes après la mort de son leader, ce qui met fin à la guerre civile dont le bilan est de 500 000 victimes. Le MPLA restera donc la première force politique du pays et démocratisera les institutions angolaises.

Mais ces conflits ont occulté le potentiel économique du pays. Le territoire angolais est richement doté en ressources naturelles, notamment en pétrole, gaz naturel, cuivre, diamants, fer, zinc, etc. L’industrie pétrolière avait déjà débutée dans les années 70 mais elle a connu un réel essor au sortir de la guerre. Le pays a même intégré l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) en 2005. C’est que, désormais, l’or noir représente 85% du PIB angolais. Arrive en seconde position l’extraction de diamants dont les exportations s’élèvent à 5% du PIB.

La production pétrolière a plus que doublé depuis 2002. Cependant, et sans se faire détrôner, elle laisse la place à une diversification de l’économie. La paix, en permettant le relogement des populations, a fait de l’agriculture et de la construction, des secteurs de croissance. Par ailleurs les pouvoirs publics, une fois légitimés, ont pu entrer dans leur rôle d’administrateurs et créer les conditions du développement économique (infrastructures en eau et électricité, encadrement juridique des entreprises, fiscalité). 

Une puissance régionale qui attire

La confiance dans un pays pacifié est l’une des clés du développement économique angolais. Par ailleurs, l’inflation à deux ou trois chiffres semble laissée au passé ; la monnaie, à l’image du pays, se stabilise. Toutes les conditions pour un boom économique post-guerre sont réunies. La reconstruction nationale, qui s'est opérée dans les années 2000, est portée par les profits issus de l’industrie pétrolière et par les crédits internationaux pour la reconstruction du pays.

Le taux de croissance s’affole (17%), bien qu’un peu ralenti par la crise de 2008. Affichant la meilleure croissance économique de tout le continent africain (Maghreb inclu) entre 1989 et 2008, l’Angola attire les investisseurs du monde entier. On se presse pour entreprendre sur cette nouvelle terre d’opportunités. Sont présents le Portugal et le Brésil, avec lesquels l'Angola partage la langue portugaise et un passé colonial, mais également la Chine ou l’Espagne. Les gigantesques centres commerciaux flambant neufs de Luanda la capitale, dont les capitaux et les technologies viennent de ces pays, sont le symbole du dynamisme des investissements étrangers.

Et les rencontres diplomatiques se multiplient. Le 25 avril prochain, ministres angolais et espagnols se réuniront à Madrid dans le cadre d’un forum sur les opportunités économiques en Angola. La semaine dernière, le ministre angolais de la Géologie et des Mines s'est rendu cinq jours au Brésil durant lesquels une coopération dans le domaine géologique et minier a été renforcée. En mars dernier, Luanda a accueilli une délégation chinoise lors d’un salon sur les technologies environnementales, secteur dans lequel les deux pays souhaitent coopérer davantage.

L’Angola confirme par les chiffres sa domination économique régionale. En 2008, elle était la septième puissance économique du continent africain. Elle pourrait se hisser à la cinquième place en 2014, selon l'économiste angolais Manuel Alves da Rocha. Son ascension est fulgurante et lui promet un poids politique plus important dans les organisations régionales. Désormais l’Angola fera peser ses intérêts auprès de la NEPAD (organe de l’Union africaine qui analyse les perspectives et projets de développement économique de la région) mais aussi d’une institution d’intégration régionale dont elle fait partie, le SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe). 

10 ans après la fin de sa guerre civile, le pays est sans conteste une nouvelle puissance économique africaine. Exemple réussi d’un modèle de développement économique fondé sur une stabilité politique et sur des investissements issus des profits miniers et pétroliers, l’Angola doit confirmer l’engouement qu’elle suscite.

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