Autriche : "tout n'était pas si mal sous Hitler"

15 Mars 2013



L’Autriche commémore cette semaine l’annexion de l’Allemagne nazie en 1938. Alors qu’un sondage paru le 8 mars montre que 42% des sondés pensent que « sous Hitler tout n’était pas si mal », où en est l’Autriche dans son travail de mémoire ?


@REUTERS | Le Président Heinz Fischer a rendu hommage aux victimes de l’Anschluss lors d’une cérémonie de commémoration au palais Hofburg
@REUTERS | Le Président Heinz Fischer a rendu hommage aux victimes de l’Anschluss lors d’une cérémonie de commémoration au palais Hofburg
Il y a 75 ans, l’Autriche devenait une province du IIIème Reich après un coup d’Etat orchestré par le parti nazi autrichien et soutenu par l’Allemagne nazie. L'événement annula ainsi la mise en place d’un référendum prévu par le chancelier de l’époque, demandant au peuple autrichien de se prononcer pour ou contre le rattachement de l’Autriche à l’Allemagne. Les troupes allemandes entrèrent en Autriche le 12 mars sous les acclamations des Autrichiens. Un gouvernement nazi fut alors mis en place et Hitler, lui-même natif de Braunau, un village autrichien, fit un discours le 15 mars sur la Heldenplatz, au balcon de l’actuelle Bibliothèque Nationale, devant plus de 250 000 personnes. S’en suit alors une nazification de l’Autriche, et des violences ont lieu le jour même envers les Juifs dans les rues de Vienne.

Bien que les traités de Versailles et de Saint-Germain-En-Laye interdisaient une union entre l’Allemagne et l’Autriche, les protestations que les Alliés émettèrent contre l’Anschluss furent faibles et n’eurent aucun effet.
L’annexion de l’Autriche fut le point central de la création du grand Reich que voulait Hitler. Il avait à ce moment-là déjà annexé la Sarre et la Rhénanie et par la suite ira jusqu’en Lituanie et en Tchécoslovaquie.

Où en est l’Autriche 75 ans après ?

Mardi 12 mars, le président fédéral Heinz Fischer a rendu hommage aux victimes de l’Anschluss lors d’une cérémonie de commémoration au palais Hofburg (à Vienne) en déclarant que le 12 mars 1938 avait été « une journée de catastrophe et d’infamie » et que les nombreux crimes du IIIème Reich n’auraient pu être commis sans l’aide d’innombrables auteurs « grands, moyens ou petits engrenages de la machine nazie ».

Un nouveau monument commémorant les victimes du nazisme a d’autre part été inauguré au cimetière central de Vienne. Tous les membres du gouvernement de coalition étaient mobilisés lors de cette journée de mémoire.

Ces commémorations résonnent étrangement avec la sortie le 8 mars d’un sondage du journal Der Standard où 42% des sondés ont déclaré que « sous Hitler tout n’était pas si mal » alors que 57% vont dans le sens contraire. Le sondage aborde les questions autour de l’Anschluss et du nazisme en Autriche : 53% des personnes interrogées pensent que l’Anschluss était volontaire alors que 46% pensent que l’Autriche était la victime.

Lors des premiers moments de l’annexion, des heurts avaient eu lieu ; à la question de savoir si de tels événements pouvaient se reproduire dans l’Europe actuelle, 12% pensent que c’est impossible, 32% considèrent que c’est probable, 39% possible et enfin 17% très probable. A la question si l’Autriche aurait dû se défendre militairement contre l’invasion allemande, 15% pensent qu’une telle guerre aurait été inutile, 42% pensent que cela aurait aggravé la situation et 43% pensent que cela aurait fait une différence.

En ce qui concerne l’indemnisation des victimes du nazisme, 57% pensent que « les victimes du nazisme et leurs descendants ont été correctement indemnisés » tandis que 42% affirment que ce n’est pas le cas. Pour ce qui est du traitement du passé nazi de l’Autriche, 61% pensent qu’il a été assez abordé tandis que 39% considèrent que cela n’a pas été suffisant. Enfin, 61% des personnes questionnées souhaitent un homme fort à la tête de l’Autriche.

Bien que ce sondage soit un constat froid de l’idée actuelle que se font les Autrichiens du nazisme, il montre la complexité pour un pays qui a subi pendant 7 ans l’occupation et la violence d’un régime totalitaire et antisémite, de se rappeler, d’avancer et de laisser derrière soi un terrible passage de son histoire.

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Baptiste Goursaud
Etudiant à Sciences Po Paris, j'ai écrit sur l'Autriche, l'Italie et d'autres sujets qui me... En savoir plus sur cet auteur