Chypre : première déflation annuelle depuis 1964

Camille Grange et Laure Curien
6 Février 2014



Pour la première fois depuis 1964, Chypre a enregistré une déflation annuelle de 0,4 % en 2013 alors que le FMI annonçait, le 20 décembre, le déblocage de 83,6 millions supplémentaires pour l’île d’Aphrodite.


Crédits -- Emily Irving-Swift / AFP
Crédits -- Emily Irving-Swift / AFP
49 ans que ça n’était pas arrivé. Le CYSTAT (Service Statistique de Chypre) a annoncé que le pays avait enregistré une déflation en 2013. Le taux d’inflation a diminué de 2,3 % au mois de décembre dernier par rapport au mois de novembre qui avait déjà connu une baisse de 2,1 %. Contrairement à décembre 2012 où l’inflation avait pris 1,1 %.

« Il est bien nécessaire de constater que l’année 2013 est la première année depuis 1964 à avoir enregistré un taux annuel d’inflation négatif », a déclaré le CYSTAT dans un communiqué. Il souligne même que « cela est principalement dû à la baisse des prix de l’électricité, des billets d’avion, des pommes de terre et de l’habillement ». Chypre fait partie des pays européens où l’électricité coûte le plus cher, l’insularité ne permettant pas d’en importer facilement. La production d’électricité est onéreuse, mais leurs unités de production ne sont pas assez conséquentes pour être indépendant.

La déflation observée à Chypre, soit une baisse générale des prix, n’est cependant pas une lueur d’espoir pour l’économie chypriote puisqu'elle est la conséquence d’une consommation faible des Chypriotes du fait d’un pouvoir d’achat en berne. A contrario, des produits de consommation courante comme les légumes frais ont vu leurs prix exploser. Les spécialistes s’attendent à ce que le PIB de l’île de Chypre recule encore en 2014.

Chypre sous assistance financière

Vendredi 20 décembre, le FMI a annoncé que l’institution financière allait débloquer une nouvelle tranche de prêt de 83,5 millions d'euros pour aider le pays en difficulté. C’est 10 milliards d’euros qui avait été négocié entre la zone euro et le FMI en mars 2013.

Dans la crise bancaire européenne, Chypre ne fait pas figure d’exception. Du fait de l’exposition de ses banques à la dette grecque à hauteur de 24 milliards d’euros, le pays était au bord de la faillite dès début 2013. En mars denier, la troïka, composée du trio Banque centrale européenne, Commission européenne et Fonds monétaire international, accorde dans le cadre d’un plan de sauvetage 10 milliards d’euros. L’île méditerranéenne devient le 4e pays de la zone euro à bénéficier d’une assistance financière internationale.

Mais ce renflouement des banques chypriotes a un prix. En échange de cette aide internationale, les bailleurs de fonds imposent alors à Chypre des mesures de rigueur budgétaire plongeant le pays dans la récession. Ce plan de sauvetage douloureux pour les Chypriotes comprend une mesure tout aussi exceptionnelle qu’impopulaire : une taxation sur tous les dépôts bancaires du pays afin de lever près de 6 milliards d’euros.

Nicosie avait dû se résoudre aussi à liquider la deuxième banque du pays, la Laïki Bank, et à restructurer la première, la Bank of Cyprus. La banque centrale de Chypre a alors fait perdre aux déposants entre 47,5 % et 100 % sur leurs avoirs de plus 100 000 euros. Les Chypriotes subissent également de plein fouet une baisse des salaires dans le secteur public suivi par le secteur privé tout en voyant augmenter taxes et impôts.

« Oui, à notre droit de travailler »

Crédits -- Reuters
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En proie à un taux de chômage record (17 % en 2013), l’île de 840 000 habitants n’est pourtant pas au bout de ses peines puisqu’il pourrait atteindre 20% en 2014. Le président, Nicos Anastasiades, a promis début décembre de débloquer 340 millions d’euros pour lutter contre le chômage.

De sévères mesures d’austérité imposées par la troïka qui avait conduit les Chypriotes en masse dans les rues de la capitale. Des mesures qui continuent à rassembler des centaines de Chypriotes pour manifester contre ce plan de sauvetage drastique.

Samedi 14 décembre, des manifestants ont défilé du ministère des Finances jusqu’au palais présidentiel pour dire « Non à l’austérité ! ».

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