Environnement : avons-nous atteint le point de non-retour ?

11 Décembre 2014



Dans la dixième édition de son rapport Planète vivante, rapport le plus complet sur l’état de santé de la planète Terre, le Fonds pour la nature (WWF) dresse un bilan alarmant : un déclin inouï de la biodiversité, et une pression sans précédent sur les écosystèmes.


L'île de la Réunion - Crédit Marie Pothin
L'île de la Réunion - Crédit Marie Pothin
Si le déclin de la biodiversité et l’épuisement des ressources de notre planète ne sont pas des faits nouveaux, ils atteignent aujourd’hui un seuil critique. C’est ce que semble annoncer le rapport Planète vivante, rapport biannuel réalisé par la WWF en partenariat avec la Zoological Society of London et les ONG Global Footprint Network et Water Footprint Network. Présenté à l’UNESCO le 30 septembre, le rapport se fonde sur trois principaux indicateurs. Mais c’est l’indice planète vivante (IPV), qui mesure l’évolution de la biodiversité à partir de plus de 10 000 groupes d’animaux appartenant à 3 038 espèces vertébrées, qui mène aux conclusions les plus inquiétantes. 

La disparition de plus de la moitié des populations d’animaux sauvages

En effet, c’est un déclin de plus de 50% qui a été constaté dans les populations des espèces sauvages entre 1970 et 2010. Un recul, en seulement 40 ans, bien plus élevé que celui estimé il y a quelques années. Mais ce chiffre ne représente qu’une moyenne. En y regardant de plus près, certaines espèces sont l’objet d’un déclin critique : c’est le cas des espèces animales d’eau douce, dont la population a chuté de 76%. Les espèces animales marines et terrestres, elles, s’en sortent avec une chute de 39% "seulement".

Le rapport Planète vivante révèle aussi des disparités géographiques considérables. Ainsi, les pertes de biodiversité les plus importantes sont observées dans les tropiques, et s’élèvent à 56%. Plus particulièrement, l’Amérique latine a perdu pas moins de 83% de ses populations d’espèces sauvages.
Les causes de cette hécatombe sont nombreuses, et connues : dégradation ou disparition des habitats naturels, la chasse, la pêche, la pollution, et le réchauffement climatique.

L’équivalent d’une Terre et demie consommée par an

C’est ici que le second indicateur utilisé par les spécialistes intervient : l’empreinte écologique, qui mesure la pression que chaque homme exerce sur l’environnement en calculant la surface terrestre et maritime dont chaque homme a besoin pour vivre. Cela inclut évidemment la production de vivres, mais aussi de biens de consommation en tous genres, les déplacements quotidiens et occasionnels, les espaces nécessaires à la construction des habitations, commerces, et enfin, les déchets que nous produisons. En 2010, l’humanité a ainsi utilisé une Terre et demie. Conséquence : les ressources s’épuisent tandis que les déchets et le carbone s’accumulent.

Ici encore, le rapport révèle des disparités géographiques majeures : la Chine, les Etats-Unis, l'Inde, le Brésil et la Russie représentent ainsi à eux cinq près de la moitié de l'empreinte écologique mondiale. Mais si l’on considère le nombre d’habitants de chaque pays, c’est un tout autre classement qui ressort : le Koweït, le Qatar, les Emirats Arabes Unis, le Danemark et la Belgique sont les grands gagnants. Dans ce classement, la France peut se vanter de n’être qu’en 23ème position... Mais avec une empreinte écologique largement supérieure à la moyenne mondiale (en réalité, presque le double). 

Les pays les plus riches sont les moins touchés

Enfin, le troisième indice du rapport Planète vivante, l’empreinte eau, permet d’évaluer les volumes d’eau douce et d’eau de pluie nécessaires à la population mondiale. Il révèle que, à l’échelle de la planète, la production agricole représente 92% de l’empreinte eau globale, loin devant la production industrielle (4,4%) et les usages domestiques (3,6%). Les plus grands consommateurs d’eau sont ainsi les Etats-Unis et la Chine dont la production et l’export de biens agricoles et industriels consomment le plus d’eau.

Alors que les pays les plus riches sont ceux qui exercent le plus de pression sur l’environnement, les pays en développement sont ceux qui connaissent le plus de pertes écosystémiques. Le rapport de la WWF se permet ainsi de nous rappeler en lettres capitales que « Aujourd'hui, près d'un milliard d'individus souffrent de faim, 768 millions vivent sans eau salubre et propre, et 1,4 milliards sont privés d'accès à une source d'électricité fiable. »

Une situation irréversible ?

La situation paraît déjà critique, et il est prévu que les choses aillent en s’aggravant. Si la population a presque triplé depuis 1950 pour atteindre les 7 milliards en 2011, on l’estime à près de 10 milliards en 2050. Mais pour Philippe Germa, directeur de WWF France, nous pouvons éviter le pire : « L'humanité peut réussir à dé-corréler son développement de son empreinte écologique. Il faut pour cela préserver le capital naturel, notamment en arrêtant de surexploiter les stocks halieutiques, produire mieux, avec moins d'intrants et de déchets et plus d'énergies renouvelables, et réorienter les flux financiers, en prenant en compte les coûts environnementaux et sociaux ».

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Marie POTHIN
Etudiante en Master de Journalisme à l'Institut d'Etudes Politiques de Lyon, passionnée de musique... En savoir plus sur cet auteur