Escapade malaisienne : une plongée exotique vers la diversité (2/2)

Mathilde Vinceneux
1 Novembre 2015



Un mois en sac à dos pour découvrir la Malaisie, voilà une expérience inoubliable. De Kuala Lumpur, capitale de verre, à Bornéo, territoire sauvage, en passant par la jungle, la mangrove, les îles paradisiaques et les villes au passé colonial, ce pays n’est pas à court de surprises. Ici, où la religion d’état est l’islam, les mosquées côtoient aussi bien les églises et les chapelles que les temples chinois et hindous. Pays en plein développement, la Malaisie est le parfait exemple d’un Sud asiatique bouillonnant.


Crédit Mathilde Vinceneux
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Sur l’île de Tioman, au Sud-Est, les fonds marins sont tout aussi fabuleux. Plus grande que les Perenthians, elle fut classée parmi l’une des plus belles îles du monde. Ici, les plages s'étendent et la jungle couvre 99 % de la surface. L’occupation humaine se limite à quelques villages, « Kampung » en malais, et se fond avec le monde sauvage. Les constructions ne se concentrent que sur une maigre bande côtière large de 100 mètres. Ainsi il n’est pas rare de croiser sur le béton de gros varans malais à la recherche des restes de barbecue, ou, comme des funambules sur les câbles électriques, des macaques qui scrutent la moindre de trace de nourriture. 

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Tioman est surplombée par des montagnes. Lorsqu’on traverse l’île par la jungle, à l’endroit où elle est la moins large, on marche au rythme de la forêt et on découvre la beauté d’une végétation abondante. On peut y apercevoir des écureuils géants, des singes, ou encore des serpents. L’île est d’ailleurs connue pour en abriter une grande variété, lui valant le surnom de « l’île aux serpents ». Après la traversée, on arrive sur Juara, une longue plage bordée de cocotiers. Au milieu de ceux-ci, un arbre regarde la mer et des centaines de chauves-souris, parfois énormes, s’y balancent la tête en bas.

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Cette plage est classée zone verte car elle est un lieu de ponte pour plusieurs espèces de tortues marines. Un centre de préservation posé sur la plage abrite Joe, une grande tortue verte, aveugle et sourde, qui n’a donc pu être relâchée dans la mer. La mission des volontaires du centre est de préserver au mieux les œufs retrouvés sous le sable jusqu’à l’éclosion. Ils essayent aussi de sensibiliser les touristes sur la condition des tortues de mer, aujourd’hui en voie de disparition. 

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Les bruits, les constructions, la lumière, la pêche, la pollution et la chasse sont autant de phénomènes qui participent à l’extinction progressive de ces animaux. La tortue luth, rare et reconnaissable à sa carapace sans écailles, avait l’habitude de pondre sur cette plage. En partie à cause de la progressive popularité du lieu, elle n'a pas été vue sur Juara depuis 10 ans.

Petit détour par la montagne, au milieu des fermes et plantations de thé

Vivre dans l’humidité et la chaleur tropicale est souvent éreintant. Ainsi, prendre un peu d’altitude est source de relaxation pour les familles malaises qui, lors des longs weekends et des vacances, filent sur les routes en direction des Cameron Highlands. Les Cameron Highlands, ce sont des vallées luxuriantes dans les montagnes, avoisinant les 1600 mètres d’altitude. Elles sont réputées pour leurs magnifiques plantations de thé, mais aussi pour les fermes et nombreuses balades qui permettent d’apercevoir la célèbre rafflésie.
 

La rafflésie, c’est l’une des plus grandes fleurs du monde avec son record d’un mètre de diamètre. Hormis sa taille, elle détient d’autres caractéristiques étonnantes. C'est une plante parasite qui, lorsqu’elle fleurit, donne cinq énormes pétales rougeâtres et souvent tachetés de blanc. Cette fleur dégage une odeur de charogne censée attirer les mouches pour la pollinisation. Après quelques jours, elle finit par faner et se décomposer en une masse glutineuse. Apercevoir cette merveille botanique demande beaucoup de chance.

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Autre star des montagnes, les exploitations de thé, comme la célèbre Boh tea plantation, constituent des tableaux étonnants. Postés sur un point en hauteur, on peut admirer les petits buissons de thé au vert éclatant qui s’alignent à perte de vue. Ces plantations créent un paysage travaillé, où la verdure semble géométriquement s'inscrire dans les collines. Ici, la main de l’Homme travaille la nature et l’esthétise. Entre les lignes, on aperçoit souvent les cueilleurs. La plupart sont indiens. Ils portent de gros sacs blancs sur le dos et détachent délicatement les fraîches feuilles des théiers. Celles-ci se dirigent ensuite vers une usine pour suivre les processus de flétrissage, de roulage, de criblage, de fermentation et de déssication avant de pouvoir être infusées dans l’eau frémissante.

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Sarawak, ancestrale et sauvage

Arriver au Sarawak, c’est découvrir le deuxième visage de la Malaisie, un visage plus authentique, plus ancestral. Le Sarawak est une des deux régions malaises de Bornéo, quatrième plus grande île monde. Cette île abrite une quantité impressionnante de parcs nationaux visant à conserver les nombreux trésors qu’elle recèle et qui font d’elle un véritable paradis primitif. En effet, elle possède une biodiversité parmi les plus riches de la planète et ses écosystèmes particuliers sont les refuges d’espèces végétales ou animales rares.
 
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Au nord de Kuching, capitale du Sarawak, une échappée vers les péninsules du parc national de Bako ou du parc national des Kutching wetlands est un bon moyen d’apercevoir les richesses du territoire. À la lisière de la mangrove, on peut apercevoir des macaques qui se chamaillent, mais aussi et surtout des nasiques. Ces grands singes au poil roux sont connus pour la particularité des mâles ; ces messieurs ont un long et gros nez mou qui leur pend au milieu de la figure. Ceux-ci se balancent et laissent parfois échapper des grouinements maladroits. Les nasiques parcourent la mangrove à la recherche de jeunes pousses qui habillent les petits arbres. Ils laissent derrière eux les squelettes de ces arbustes qui ajoutent une touche mélancolique mais poétique aux décors spectaculaires des lieux.
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La nuit sur une barque, on peut aussi apercevoir des crocodiles. Il suffit de passer une lampe torche au ras de l’eau pour voir s’éclairer au loin des yeux brillants. Si on se rapproche, on peut alors découvrir un gros reptile immobile et patient sur la rive. Le voir ensuite s’engouffrer et disparaître dans les eaux à quelques mètres de la barque laisse quelques frissons. La baignade dans ces eaux limeuses le long des mangroves est donc impossible. Néanmoins, on peut s’adonner à d’autres plaisirs, en parcourant les nombreux sentiers du parc national de Bako.
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Les chemins dans la jungle dévoilent différents types de végétations, celle plutôt rase et dispersée aux points culminants et une autre dense et luxuriante lorsque l’on s’enfonce dans la jungle. Les chemins sont alors couverts de racines et de mousse au vert éclatant. Au bord de la jungle s’étalent des plages de sables blonds aux abords escarpés. Elles sont entourées par de grands pans de roche, creusés et colorés par l’érosion. Ce phénomène a sculpté la pierre à l’orée de la mer si bien qu’un rocher en a même pris la forme d’une tête de cobra, et est ainsi devenu le symbole du parc. 
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Si l’on quitte ces parcs direction le sud de Kuching, on découvre alors des vallées perdues, longées de petits kampungs encerclés par la flore. De petites collines donnent à l’ensemble un charme dont seule l’Asie a le secret. Au coeur de celle-ci se cachent des grottes habitées par de nombreuses chauves-souris. La plus fameuse est appelée la fairy cave, ou grotte des fées. Accessible à 30 mètres au-dessus du sol par un escalier, elle est un puits de lumière au cœur de la roche. L’eau y goutte et humidifie les pentes jonchées de petites plantes au vert incroyable. Le plafond est recouvert d’imposants stalactites. La lumière qui pénètre dans ce creux grand comme un stade de foot donne à l’endroit une dimension singulière. Après avoir quitté la grotte, son atmosphère enchantée plane encore au-dessus des têtes. 

Mais le Sarawak ne permet pas uniquement de découvrir un environnement extraordinaire : il est aussi, comme l’ensemble de Bornéo, le territoire des populations autochtones malaises. Ainsi, plus loin le long des routes, on peut s’arrêter dans les villages et visiter des longhouses. C’est dans ces maisons à l’architecture étonnante que les populations aborigènes vivaient et vivent toujours pour certaines communautés. Ces habitations sur pilotis sont constituées généralement d’une longue pièce commune, longée par différents petits espaces clos, plus privés. De cet agencement découle de nombreuses relations sociales qui soudent la communauté. Les spécificités architecturales et les coutumes pratiquées dans ces maisons-villages varient selon les groupes.
 

Ces populations aborigènes, « les hommes des origines » ou en malais les « orang asli » se divisent en plusieurs groupes ethniques. Ils sont à l’origine chasseurs-cueilleurs et certains font partie de groupes nomades. Mais aujourd’hui, beaucoup veulent profiter des avantages de la vie moderne autant que les populations citadines. Les jeunes des longhouses détiennent des téléphones portables au fond des poches de leurs jeans, et les télévisions ne sont pas rares. Les costumes traditionnels sont souvent revêtus lors des fêtes et cérémonies ou lors des visites. Ces ethnies ont bien compris que leur culture, leur mode de vie et leur artisanat étaient prisés par les touristes. L’activité touristique dénature quelque peu ces cultures mais constitue aussi une source de revenu qui permet à ces populations de subsister dans une société en plein développement.
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La tradition est souvent oubliée et souillée dans la course vers la modernité. Ce processus est au détriment non seulement des cultures mais aussi de l’environnement. Bornéo comme la Malaisie dans son ensemble est un territoire à protéger car une grande partie de sa forêt primaire, habitat des orang asli, est victime d’une intense déforestation au profit de la culture de palmier à huile.

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