Fin de l’Eldorado pour les OGM au Pérou

1 Décembre 2012



Le Pérou a voté une loi établissant un moratoire de dix ans sur l’importation et la culture d’organismes génétiquement modifiés (OGM). Retour sur une décision qui sépare les pays latino-américains en deux camps.


Fin de l’Eldorado pour les OGM au Pérou
 
Un an après le vote de la loi établissant un moratoire sur l’importation et la culture d’OGM, le décret d’application vient d’être adopté en Conseil des ministres : le pays a officiellement banni les OGM de son territoire. Cette décision avait été l’une des premières prises par le Président fraîchement élu, Ollanta Humala (coalition de gauche) en juin 2011. Il semblerait que la loi corresponde à la volonté populaire : des « zones sans OGM » avaient été décrétées dans plusieurs régions, confirmées par les sondages d'opinion. La loi instaure un moratoire sur l’importation et la culture des organismes vivants modifiés (OVM) de dix ans. Sont exclus de l’interdiction les cultures à but scientifique, les OGM destinés aux produits pharmaceutiques, et les produits transformés (notamment alimentaires) en contenant.

Le Pérou devient l’antithèse de l’Argentine et du Brésil, deux géants dans le secteur des plantes génétiquement modifiées qui produisent et exportent massivement des OGM (notamment pour nourrir les animaux d’élevage en Europe). Le Brésil a d’ailleurs augmenté cette année encore la surface de ses cultures, selon le cabinet-conseil en agroalimentaire Céleres.

Les non-alignés

Le pays fait partie d’un cercle restreint de pays, parmi lesquels on peut trouver l’Equateur et la Bolivie (tous deux ayant un gouvernement de gauche critiquant ouvertement les Etats-Unis d’où proviennent majoritairement les semences OGM type Monsanto). Ces deux pays ont même inscrit cette interdiction dans leur constitution. Le Kenya a récemment annoncé son ambition de cesser l’importation d’OGM, démontrant que l’Afrique peut aussi dire « non » aux entreprises nord-américaines.

En France, les cultures d’OGM à destination commerciale sont interdites (c’est-à-dire destinées à l’alimentation humaine). La réglementation française fait suite à la directive européenne de 2001 qui interdit la culture de plantes génétiquement modifiées à proximité d’autres cultures pour éviter une contamination. Cependant, les OGM sont présents dans la majorité des produits transformés (non biologiques), que ce soit dans la composition des aliments ou dans l’alimentation animale. Greenpeace France publie chaque année une liste non-exhaustive des produits disponibles en grande surface, en les classant par catégorie (contenant des OGM ou non).

C’est en France que le professeur G.E. Séralini a récemment publié une étude sur la toxicité des plantes génétiquement modifiées, qui a eu écho au Pérou et dans le reste du monde. Avant lui, d’autres scientifiques dans le monde avaient publié des recherches sur les possibles effets néfastes des OGM sur la santé humaine, en dénonçant notamment les protocoles des tests de toxicité avant commercialisation ou autorisation. Mais ces tests, menés par les entreprises elles-mêmes, perdent en crédibilité.  

Le gouvernement péruvien a donc choisi de faire barrage aux OGM pour une période de dix ans, laissant la porte ouverte à une révision de la loi en 2021. Le pays pourra alors revenir sur l’interdiction des OGM ou bien, à l’instar de ses voisins, l’inscrire dans sa constitution.

Notez


Laura-Lise Reymond
Ex-responsable du pôle traduction et rédactrice à ses heures perdues. En savoir plus sur cet auteur