Fraises grecques: le prix du sang à Manolada

24 Avril 2013



Le 17 avril dernier, des travailleurs saisonniers bangladais de la ferme de Manolada, dans la région du Péloponnèse en Grèce, manifestant pour réclamer leurs salaires impayés depuis six mois, ont été les victimes de tirs, faisant une trentaine de blessés.


Fraises grecques: le prix du sang à Manolada
Le 17 avril 1996, à Eldorado dos Carajás, dans l’État amazonien du Pará au Brésil, près de 1500 paysannes et paysans du Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans Terre bloquaient une autoroute pour exiger une réforme agraire. L’intervention de la police militaire fera 22 morts et de nombreux blessés. En commémoration à cet évènement, le 17 avril a été décrété journée internationale des luttes paysannes par le mouvement international La Via Campesina.

C’est donc le 17 avril que les travailleurs saisonniers bangladais de la ferme de Manolada, dans la région du Péloponnèse en Grèce, se sont réunis pour réclamer leurs six derniers mois de salaire impayés. Les superviseurs de la ferme ont répondu en tirant sur les travailleurs, faisant plus d’une trentaine de blessés.

On estime que 3000 immigrés vivent et travaillent, illégalement, sur les champs de fraises de la région de Nea Manolada sous l’emprise de la mafia locale. Le salaire journalier n’excède pas dix euros et les conditions de travail demeurent très difficiles.

Une campagne de boycott a été lancée pour contraindre les grandes surfaces à ne plus vendre les fraises de la ferme de Manolada. Déjà plusieurs grandes surfaces ont décidé de retirer de leurs rayons les fraises de Manolada.

Les immigrés boucs-émissaires

Les évènements de Manolada rappellent la situation inquiétante des immigrés en Grèce. Coïncidence, la veille de la tragédie de Manolada, le Conseil de l’Europe exhortait la Grèce à enrayer l’augmentation des crimes de haine et à combattre l’impunité, dénonçant non seulement les violences racistes, mais aussi « la classe politique grecque », qui « tient souvent des propos stigmatisant les immigrés ».

De fait, le Premier ministre grec, Antonis Samaras, avait donné le ton pendant sa campagne aux législatives de juin 2012 en durcissant son discours : « Alors que les familles grecques luttent pour survivre, la Coalition de la gauche radicale veut offrir aux immigrés l'accès aux allocations chômages et aux permis de travail (...) Il faut reconquérir les villes face à ceux qui ont afflué sans autorisation (...) L'invasion des immigrants va cesser et des expulsions massives vont commencer. » Il avait ajouté au soir de sa victoire que « les immigrants clandestins [étaient] devenus les tyrans de la société ».

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Journaliste spécialiste des questions économiques. En savoir plus sur cet auteur