Internet, nouvelle scène citoyenne

Bonakor
21 Janvier 2013




Internet, nouvelle scène citoyenne
J'ai découvert l'existence de Julian Assange en novembre 2010 grâce au site Arrêtsurimages.net qui revenait sur les premiers documents révélés par Wikileaks, en juillet 2010. Il s'agissait d'éclairer le réel nombre de victime de la guerre en Afghanistan. Notamment, une vidéo d'assassinat de journalistes par les forces américaines.
Néanmoins, le monde occidental n'a véritablement pris connaissance de l'existence de Wikileaks que lors de la diffusion massive de cables diplomatiques. Ceci pour plusieurs raisons. D'abord, les cables racontaient une histoire, ils étaient exploitable par les médias traditionnels. J'ai en mémoire la Une du journal Le Monde "Sarkozy l'Américain". Dans ce numéro spécial, le lecteur se passionnait pour les petites histoires diplomatiques, il avait l'impression de faire partie du monde des puissants ou tout du moins, d'en saisir mieux les enjeux.
Peu après, l'Occident, particulièrement les Etats-Unis, gênés par Wikileaks, entamèrent une croisade contre son fondateur, Julian Assange. Ce dernier a dès lors endossé le costume d'apôtre de l'internet libre, de la réappropriation de la démocratie par les citoyens. Il n'est à mon sens pas anodin que l'ascension -puis la chute- de Wikileaks aient eu cours la même année que les mouvements indignés et que les Révolutions Arabes.

Pour la première fois, l'Internet prenait pied dans la vie réelle. Ceci est dû à la montée en puissance des réseaux sociaux. Internet s'est défait de son apparence d'insaisissabilité. Ce n'est pas juste des données virtuelles. La vie réelle s'est développée sur le web.
A côté de cela, il y a une idéologie du web 2.0 basée sur la notion de partage. Clairement, et je doute de plus en plus d'aspect positif de la chose, la gratuité systématique en vigueur sur Internet depuis le départ a précédé cette idéologie.
Avant d'être un outil de partage social, le web était un outil de partage de fichiers, de photos, et plus tard, de vidéos. Dès lors, les gens se sont attachés à une gratuité qu'ils ont toujours cru acquise. Alors quand le FBI décide de bloquer et fermer Megaupload, branle-bas de combats.
Sopa et Acta, traités connus alors par une minorité d'activiste anonyme sont devenus les cibles des utilisateurs variés. Anonymous a émergé franchement et a conduit les mouvement d'oppositions aux traités.
En clair, le Web n'est pas qu'un outil, qu'un médium. Il n'est sûrement pas arrivé à maturité. Il offre un éventail de possible infini.
Candidat à rien témoigne de la facilité que peut avoir le tout un chacun à s'approprier cet espace et à le transformer en espace de liberté.
Nous avons la chance de ne subir aucune obligation de rentabilité. Il ne nous est pas nécessaire de mettre en place de la publicité, de publier sur des sujets qui buzzent ou d'être soumis à des normes de taille ou de forme. Bien évidemment, le format impose de lui-même certaines contraintes, être synthétique, direct, court, mettre en place des repères visuels.

Kim DotCom a lancé samedi dernier son nouveau site Mega, un an après la fermeture de Megaupload
Kim DotCom a lancé samedi dernier son nouveau site Mega, un an après la fermeture de Megaupload
Il n'en demeure pas moins que ce que nous produisons constitue la véritable idée du web, notamment 2.0. Or, les gouvernements, bien naturellement, commencent à chercher à encadrer le web et ses dérives. Les majors sont bien conscient du manque à gagner lié au téléchargement illégale. Il nous revient donc de maintenir à notre échelle, la liberté à laquelle on s'est habitués. Internet gagne progressivement ses galons de médias respecatbles, à même de fournir un contenu de qualité.
En outre, les revenus insolents de Google mettent à mal l'impression d'égalité qu'il peut y avoir entre les éditeurs de contenus et ceux qui se chargent d'amener ce contenu à l'internaute.
Les prochains mois devraient voir un affrontement réel entre les médias, afin de définir un cadre de rentabilité. Le blocage par Free de la publicité a mis en avant l'impérieuse nécessité de trouver une alternative au financement "au clic".
L'arrivée de Mega sur le marché pourrait aussi proposer une nouvelle façon de rémunérer les artistes et éditeurs.
Je l'ai dit plus haut, il est impossible que le web continue à prôner le tout gratuit. Le financement par la publicité n'est pas un modèle viable et le modèle tout abonnement à la Arrêt sur images ou Mediapart ne peut fonctionner qu'à petite échelle. Néanmoins, les ayants droits et les personnes intéressés au problème ont une approche fermée au dialogue. En refusant d'entendre les besoins des internautes, il leur est impossible de parvenir à la mise en place d'un modèle viable.
Ainsi, des prémisses de Wikileaks au blocage des publicités par Free, en passant par la fermeture de Megaupload, Anonymous ou les révolutions arabes, Internet a vécu ces dernières années de profondes mutations. Il est devenu un enjeu de la politique réel.

Plus encore, les positions successives occupées par des Assange, DotCom ou Zuckerberg et surtout le caractère éphémère de l'auréole dont on les a coiffé nous enseignent qu'il est impossible d'incarner le Web et surtout, de le résumer à une seule personne. Car s'il y a bien un phénomène qu'il semble difficile de contrer, c'est le caractère collectif et populaire d'Internet.

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