Klaus Iohannis, un nouveau président pour la Roumanie

29 Novembre 2014



Le 16 novembre, le candidat chrétien libéral remportait les élections présidentielles roumaines, écrasant son rival, le Premier ministre Victor Ponta. Dans l’un des pays les plus pauvres de l’Union européenne, où la corruption est omniprésente, la victoire de cet homme discret sur lequel personne n’aurait parié, fait figure de renouveau dans le paysage politique. Portrait.


Crédit DR
Crédit DR
Il y a quelques semaines, personne n’aurait parié sur sa victoire. Et pourtant, le 16 novembre dernier, contre toute attente, Klaus Iohannis était élu président de la Roumanie.

Avec plus de 54% des suffrages, le candidat chrétien libéral a en effet créé la surprise en devançant son rival, le Premier ministre social-démocrate Victor Ponta, arrivé en tête au premier tour, et que tous les pronostics désignaient vainqueur.

 Il faut dire que cette victoire écrasante marque une rupture dans l’histoire politique du pays, Klaus Iohannis étant à lui seul un représentant de deux minorités du pays : premier président issu de la minorité allemande, il est aussi de confession protestante, dans un pays où 90% de la population est orthodoxe.

Un homme discret

Souvent décrit comme discret, l’homme de 55 ans, était peu connu avant ces élections. Ancien professeur de physique, il est entré en politique par la petite porte, il y a 15 ans en étant élu, là aussi contre toute attente, maire de Sibiu, ville médiévale allemande du centre du pays. Une ville de province proche de la ruine, qu’il a fait passer, en bon gestionnaire, à l’une des  principales destinations touristiques du pays en seulement quelques années. Si bien que les habitants de la ville lui ont renouvelé leur confiance en le réélisant maire pour trois mandats supplémentaires.

Et c’est seulement lorsque sa ville est devenue capitale européenne de la culture en 2007, qu’il a réellement fait son apparition sur la scène nationale. Depuis juin, il est aussi le président du Parti National Libéral.

Du fait de sa personnalité atypique, voire taciturne, et de son manque d’aisance face aux caméras, on lui reproche souvent de ne pas avoir le charisme de son adversaire, Victor Ponta. Mais pour autant, beaucoup ne tarissent pas d’éloges sur lui : « tolérant », « droit », « honnête », « ouvert » sont autant d’adjectifs utilisés pour le décrire.
 

Et comme en miroir à ces valeurs qu’on lui attribue volontiers, de sa campagne, on retiendra surtout son cheval de bataille : la lutte contre la corruption, une pratique qui gangrène depuis de nombreuses années la vie politique du pays. Un combat qui a su trouver écho en Trajan Basescu, l’ancien président du pays, mais aussi en Angela Merkel, deux personnalités politiques de poids qui lui ont affiché un soutien indéfectible durant ces élections.

Et si entre les deux tours de l’élection présidentielle, une campagne calomnieuse a été déclenchée à son encontre, par laquelle on l’a entre autres accusé d’avoir vendu des enfants à des trafiquants d’organes et d’avoir utilisé l’argent public à des fins personnelles, celle-ci n’a pas réussi à entacher sa réputation.

En témoignent les scènes de liesse qui se sont jouées à sa victoire dans tout le pays et l’accueil qui lui a été réservé par beaucoup de Roumains.
« Nous sommes très heureux de sa victoire, car c'est un politicien qui nous inspire beaucoup de confiance », explique ainsi Maddy, une étudiante roumaine, « pour la première fois depuis longtemps, on se sent tous unis par les mêmes idées, surtout les jeunes. En règle générale, on se moque de la politique mais aujourd’hui tout le monde est fier du résultat de ces élections. Iohannis représente quelque chose de différent, dont le pays a vraiment besoin », rajoute-t-elle.

Un nouveau départ pour la Roumanie ?

La victoire de Iohannis semble en effet marquer un nouveau départ pour le pays. Comme si le peuple roumain, lassé d’un schéma politique post communiste archaïque hérité de l’ancien régime et de la corruption ambiante, avait voulu envoyer un signe fort au monde politique.  Ainsi, de l’avis des observateurs avertis, cette élection marquerait avant tout la défaite de Victor Ponta envers qui le peuple a voulu manifester son rejet.

Il faut préciser ici, que si celui-ci a reconnu sa défaite, il refuse encore aujourd’hui de démissionner et entend bien rester à la tête du gouvernement. Une démission pourtant réclamée par des milliers de Roumains descendus dans la rue au soir de l’élection.

Mais ce qu’il faut retenir de ces élections, est avant tout la victoire de la démocratie : avec un total de 64,10% de participation au second tour, le pays a connu une mobilisation inhabituelle de son électorat, surtout en ce qui concerne les Roumains de la diaspora. « Chers Roumains, aujourd’hui vous avez été des héros. Le vote a été phénoménal. La participation au vote a été énorme », s’est ainsi réjoui le nouveau président quelques instants après son élection.

Le mandat du président Iohannis commencera le 22 décembre prochain. Durant cinq ans, outre cohabiter avec son rival, il devra aussi s'attaquer aux grands problèmes du pays que sont la pauvreté, l’écart de développement entre les villes et la campagne, l’exode des Roumains vers l’étranger, et l’état de l’infrastructure. En somme, une mandature bien remplie en perspective. Et l’aube d’une nouvelle gouvernance, comme signe d’un espoir d’un nouveau départ pour le pays. Avec ses 20 millions d'habitants, la Roumanie reste encore le plus pauvre de l'Union européenne après la Bulgarie. 

Notez