Les femmes encore exclues du pouvoir au Moyen-Orient

Clotilde Alfsen
30 Mai 2013



Alors que les femmes se voient refuser le droit d’être candidates aux élections présidentielles de juin 2014 en Iran, de nombreuses personnalités du Moyen-Orient revendiquent le droit à la prise de décision politique pour les femmes.


Les femmes encore exclues du pouvoir au Moyen-Orient
En Syrie, la crise politique pourrait mener à la chute de Bachar Al-Assad. En Iran, des élections présidentielles se préparent. Au Liban des élections législatives auront lieu en juin 2013. Y aura-t-il un changement en faveur de la représentation des femmes ? Dans ces pays du Moyen-Orient, les femmes sont extrêmement actives au sein la société civile et ont accès à l’éducation. Ce qu’elles déplorent c’est le manque de représentativité de leurs intérêts du fait de l’absence frappante de femmes lors des prises de décision. 

Une sous-représentation des femmes

En Iran, au Liban et en Syrie, les femmes sont présentes et actives dans toutes les sphères de la société mais sont exclues de la sphère politique. Les 30 femmes qui ont voulu se présenter aux élections présidentielles en Iran ont dû se retirer. Seules 4 femmes pour 128 députés siègent au Parlement libanais et il n’y a que trois femmes au sein de la Coalition nationale syrienne.

En Iran, les femmes représentent 60 % des étudiants et participent pleinement à l’activité économique du pays.  Leur interdiction d’être candidate aux présidentielles va à l’encontre de la constitution du pays et du droit international. Elles ont été écartées car le Conseil a considéré que le mot « rejal » employé dans l’article 115 de la constitution iranienne, qui affirme que seules « les personnalités religieuses et politiques » peuvent se présenter, signifiait « homme » et non « personnalités ».  

Au Liban, l’association Women in front condamne la sous-représentation des femmes. Nada Saleh Anid, co-fondatrice de l’association, regrette que, malgré des conventions signées par le Liban en 1979 et 1995, le quota de 30 % de femmes dans la sphère politique soit loin d’être appliqué. Elle rejette l’argument du gouvernement qui évoque l’état de sécurité du pays et exige la création de lois qui garantissent les droits des femmes. La stratégie de cette association suit trois axes : une campagne publicitaire qui diffuse des messages d’encouragements aux femmes souhaitant se présenter aux élections législatives et des incitations à voter pour des individus qui représentent les intérêts des femmes ; la diffusion d’un annuaire de 150 femmes expertes transmis aux médias pour accorder aux femmes une visibilité dans tous les domaines ; et l’identification de 64 femmes formées à très haut niveau qui souhaitent participer à la vie politique. Women in front contribue à promouvoir les femmes à des postes décisionnels, en collaboration avec l’association SMART Center for Media and Advocacy et le ministère de l’Information au sein d’une campagne publicitaire appelée « Media supporting Women leaders ».

La chute de Bachar Al-Assad donnerait-elle une place aux femmes ?

C’est en Syrie qu'ont été nommées les premières vice-ministres et procureures générales du monde arabe. Alors que la Syrie se concentrait sur la question de l’émancipation politique et sociale des femmes dans les années 70, elle connaît aujourd’hui un recul de l’égalité entre les sexes. En pleine guerre civile, les femmes se placent en première ligne du combat mais sont toujours exclues des prises de décision politique et stratégique.

Seulement trois femmes sont présentes au sein de la Coalition nationale syrienne : la vice-présidente Suhair Atassi, Rima Flihan, et Mona Mustafa. Beaucoup d’hommes politiques reconnaissent leur importance mais ne daignent pourtant pas leur accorder un vrai rôle politique. Pour Riman Flihan, « c’est honteux et décevant. Une des raisons pour lesquelles j’ai gelé mon adhésion était la faible représentation des femmes ». Pourtant les femmes sont intervenues dans de nombreuses manifestations et ont tenté d’empêcher des arrestations. Elles s’occupent des hôpitaux, diffusent l’information, elles prennent même les armes et se joignent aux combats. Elles sont violées et torturées dans les prisons du régime. Mais elles n’ont pas encore un droit de parole égal aux hommes.

En janvier dernier, le Syrian Woman’s network est créé à Doha, pour proposer une structure qui jouerait un rôle dans la période de transition. L’association exige la participation des femmes aux négociations, à la résolution des conflits, à la réconciliation, et aux élections des membres du gouvernement. Il s’agit également de régler le problème de la violence faite aux femmes, et celui de l’éducation.

Arwa Damon, correspondante internationale pour CNN confirme le rôle primordial que jouent les femmes lors de la révolution : « Le fait que les femmes aient été parmi les premières à manifester contre le régime est très peu signalé. Mais en plus de ça, les femmes sont sous représentées au cours des conseils locaux d’opposition en Syrie et dans le corps d’opposition qui existe en dehors du pays ».  Alors que le nombre de femmes qui prennent les armes contre le régime va croissant, des rapports montrent que la violence fondée sur le genre augmente elle-aussi, notamment la pratique du viol systématique.  Il est aujourd’hui difficile de savoir s’il y a une réelle possibilité de changement pour les femmes après Bachar Al-Assad. 

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