Malaisie : cinq hommes tués lors d'une descente de police à Penang

22 Août 2013



Lundi matin, dans la banlieue de Georgetown, cinq hommes supposés appartenir au gang malaisien 04 ont été abattus dans leur appartement. Alors que la police invoque la légitime défense, de nombreuses questions restent en suspens et des contestations se font entendre.


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Alors que les meurtres semblent se multiplier en Malaisie, lundi matin, cinq jeunes hommes ont été abattus par la police dans un appartement de la banlieue de Pantai Jerejak à Penang. J. Gobinath, R. Ramesh, A. Vinut, M. Suresh, et M. Gobinath, âgés de vingt à trente ans et membres de la communauté indienne, sont supposés appartenir au gang 04 qui sévit dans la région. La police aurait demandé aux hommes de se rendre alors qu'ils encerclaient l'appartement. Des balles auraient été tirées de l'intérieur de la maison en direction de la police, ce qui aurait conduit les forces de l'ordre à pénétrer dans l'appartement et à tirer sur les individus. L'inspecteur général de police, Tan Stri Khalid Abu Bakar, a déclaré que la police n'a fait que répondre à une agression : « Nous avons été visés en premier, et nous avons tirer en retour pour nous défendre. Cela a, par la suite, conduit à la mort des cinq hommes ».

Mardi, plus de cinquante membres des familles des victimes se sont rassemblées devant la morgue afin de protester contre les événements et de demander des explications à la police. S. Nadarajah, l'oncle de l'une des victimes, s'interroge : «  Pourquoi les ont-il abattus alors qu'ils auraient tout simplement pu lancer des tirs d'avertissement ? Ils dormaient tous à l'intérieur, et la police aurait facilement pu les arrêter ». Le député Seri Delima, soucieux de soutenir les familles dans leur quête, les a accompagnées au poste de police afin qu'elles puissent demander une seconde autopsie. Ce denier exige de l'inspecteur général de police et du directeur du poste de police, des explications qui pourront satisfaire les familles. « Même s'ils avaient des casiers judiciaires, ils auraient dû être arrêtés et conduits devant une Cour pour être jugés, pas brutalement abattus ». Hier soir, les corps des cinq victimes ont été réclamés par les familles, bien que les corps ne puissent être restitués tant que les investigations sont en cours.

La mort brutale des cing individus soulève certaines interrogations. Le journal national Sun Daily écrit que les hommes « sont supposés appartenir à un gang » tandis que le New Straits Times fait état du « plus grand succès de la police dans la répression des sociétés secrètes ». Selon la police, des investigations seraient actuellement en cours afin de déterminer si ces individus sont impliqués dans les récentes affaires à Penang. L'affaire, si elle semble ne pas faire de bruit dans le pays, remet sérieusement en question le caractère démocratique de la politique intérieure malaise. La police affirme que ces hommes avaient un casier judiciaire et qu'ils étaient impliqués dans plusieurs meurtres, ce qui seraient confirmés, selon l'Inspecteur général de police, par des tests balistiques réalisés sur les armes à feu. Cependant, le père de l'une des victimes, V.R Murugasen, affirme que son fils n'avait pas de casier judiciaire. « Comment pourrait-il appartenir à un gang alors que son casier était vierge ? Ils ont tous les cinq grandi ensemble et venaient d'arriver dans cet appartement trois jours auparavant. Ils étaient très proches et certains venaient chez moi pour prendre le repas ».



Le gouvernement en désaccord avec la police

Le ministre adjoint au département du Premier ministre P. Waythamoorthy a remis en question les explications de la police, selon lesquelles les cinq hommes auraient été tués dans une fusillade et évoque, lui, des tirs à bout portant. Waythamoorthy est équivoque. « Le crime est un enjeu sérieux dans le pays, et la police doit s'y attaquer, mais tuer des gens n'est pas une solution pour y parvenir ». Le président de l'Hindu Rights Action Force s'insurge, lui aussi, contre la tournure des événements. Selon lui, la police n'aurait en aucun cas fait preuve de légitime défense.

« En regardant les photos, je ne pense pas que quiconque avec un esprit sain croirait à une fusillade entre la police et les suspects ». Il presse le procureur général Tan Stri Abdul Gani Patail d'ouvrir une enquête afin de déterminer les causes de la mort des cinq hommes. La communauté indienne et ses représentants s'inquiètent de voir les Indiens être régulièrement la cible d'opérations policières injustifiées, alors que de plus en plus de meurtres sont aujourd'hui commis contre la communauté indienne.

Aujourd'hui, des graffitis avec l'inscription 04, symbole hindou du swastika, et l'inscription « Rest in Peace », ont été retrouvés sur les murs du quartier général de la police à Kuala Lambat dans l'Etat de Selangor. Les mêmes graffitis auraient été peints sur les murs de plusieurs boutiques dans le quartier, en soutien aux victimes de la fusillade de Penang. La police promet de prendre des mesures vigoureuses contre contre les coupables, alors que le chef de la police de Selangor Datuk, A Thaiveegan, appelle les parents des victimes à coopérer avec la police. « Quand une confrontation avec la police arrive, tout le monde crie et cela créé des problèmes. Ces derniers mois, des gens se sont plaints de fusillades et se sont demandés ce que la police faisait. Alors quand nous agissons contre les suspects, les gens devraient nous apporter leur soutien. Ce que nous faisons, nous le faisons pour la communauté ».

Cet incident est certainement loin d'être le dernier. L'inspecteur général de Police M. Khalid a récemment déclaré, lors d'une conférence de presse, que de nombreux « vestiges de ce gang » persistaient dans la région et que les opérations pour les retrouver allaient se poursuivre. Face à la recrudescence des crimes et des gangs armés, la police a récemment lancé une opération spéciale surnommée Ops Cantas, afin de traquer les membres des gangs dont « les jours sont désormais comptés » d'après le Sun Daily

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