The Master : l'OVNI de la semaine

10 Janvier 2013



The Master entre dans la lignée des films inclassables, de ceux qui sont uniques en leur genre. Un grand retour, tant attendu, de Joaquin Phoenix qui pourrait bien relancer une carrière qu'il annonçait finie en 2010.


The Master : l'OVNI de la semaine
Sur le papier, l’histoire a l’air simple. Un vétéran de la Seconde Guerre Mondiale, Freddie Quell (Joaquin Phoenix) cherche à intégrer une société qui ne comprend pas son traumatisme. Il tombe rapidement sous l'emprise de Lancaster Dodd (Philip Seymour Hoffman). Surnommé « le Maître », il est le leader charismatique du mouvement « la Cause ». Ce film traite d'une folie, celle d'un vétéran incompris, tiraillé entre son passé et le délire du « Maître » qui croit avoir réponse à tout.

Voilà plus de cinq ans que Paul Thomas Anderson, auteur insoumis et réalisateur de génie, n’avait pas réalisé de long métrage. Cette attente en vallait la peine. Il réalise-là un merveilleux film dramatique sans pathos, ni excès. Ce qu’il faut au bon moment. En prime, l'ingénieuse idée de filmer The Master en 70 mm - un format délaissé par le cinéma depuis les années 60 - rend plus réaliste et plus nette l'image de l'univers des années 50.

Joaquin Phoenix interprète parfaitement la décadence de son personnage désespéré et incompris. Tout est dans sa démarche, ses mouvements. Son corps remplace le dialogue, parvenant à exprimer des sentiments via sa seule gestuelle et son regard. Résultat, Joaquin Phoenix retourne à l’essence même du cinéma muet.

C’est avec plaisir que l’on retrouve Philip Seymour Hoffman dans le rôle du « Maître », personnage charismatique qui vient en aide à ce vétéran, à la limite de la folie. Très vite, une amitié forte se crée car ce « Maître » semble se reconnaître dans la démence du militaire. Il deviendra le cobaye de ses expériences, dans des scènes très marquantes du film. Il se soumettra à un jeu de questions/réponses psychologiques. Selon Lancaster, l'homme enregistre tout durant son existence, et il peut s'en souvenir selon différents procédés.

A noter également la participation d’Amy Adams, qui joue le rôle de la femme du Maître, Lancaster Dodd. Malgré un personnage moins présent, ses apparitions sont toujours pertinentes. Elle comprendra très rapidement le changement de son mari depuis l’arrivée de Freddie.

Autre acteur majeur du film : la bande originale. Composée par Johnny Greenwood du groupe Radiohead, chaque son s'insère dans le décor et devient partie intégrante de la mise en scène. Pour plus de réalisme, le compositeur s'est inspiré du travail d'Otto Luening, pionnier de la musique électronique des années 50. Ce n'est pas la première fois que le musicien contribue sur un long métrage de Paul Thomas Anderson, puisqu'il a déjà travaillé sur la bande originale du film  There Will Be Blood, en 2008.

L'oeuvre d'Anderson offre une portée très philosophique et amène à la réflexion sur l'être passé, présent, ainsi que sur son âme. Quand un des fidèles demandera au Maître « qui est à l'origine de l'homme ? », Lancaster donnera cette réponse énigmatique : « nous sommes à l'origine de l'origine ».

Ce long métrage permet de mieux comprendre l'importance accordée aux sectes aux Etats-Unis. Le réalisateur dit clairement qu'il ne s'agit pas d'un biopic sur la création de la scientologie par L.Ron Hubbard, mais plutôt d'une approche très psychologique. Selon lui, l'intrigue peut se dérouler dans n'importe quel pays.


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Jérémy BICHON
Rédacteur (étudiant en licence de science politique). Jeune aspirant au développement du... En savoir plus sur cet auteur