Beyrouth, ou du racisme au quotidien

Marilene Karam, correspondante à Beyrouth
11 Octobre 2012



Un scandale à l’aéroport de Beyrouth, ce samedi 6 octobre, remet sur le tapis la question du racisme toléré et institutionnalisé dans le pays, et alimente un débat brûlant depuis déjà quelques mois.


Crédit photo  Akel Hawa
Crédit photo Akel Hawa
Filipino people, stop talking ! (Philippins, arrêtez de parler) crie l’hôtesse de la Middle-East Airlines dans le micro de la salle d’embarquement, à l’aéroport international de Beyrouth. Népalais et Philippins, il est interdit de parler, répète-t-elle. Ces deux phrases, postées sur Twitter par un témoin choqué font beaucoup de bruit dans l’opinion publique libanaise. De nombreux Philippins, Sri Lankais ou Ethiopiens viennent travailler au Liban dans des conditions précaires, et occupent le plus souvent les postes considérés comme dégradants : employés de maison, hommes à tout faire dans les supermarchés, ou éboueurs.

Cet incident pointe du doigt les comportements humiliants ou violents envers ces émigrés, mais ce n’est pas le premier du genre. En avril 2012, le suicide d’une jeune employée de maison qui demandait asile à l’ambassade éthiopienne a suscité beaucoup d’émotion. Depuis, des vidéos sur le net dénoncent toutes les formes de comportements discriminatoires.[voir lien youtube] On y entend par exemple des dialogues entre des gérants de plages et des jeunes, qui se déroulent tous plus ou moins de la même façon: Une femme de ménage a accès à la plage, mais elle n’a pas le droit de nager dit le gérant/ Et pourquoi cela ?/  Elle ne paie pas d’entrée/ Ah bon ? Mais pourquoi ne pourrait-elle pas nager ?/  Madame, Vous accepteriez de nager au même endroit que votre « bonne » ? / … Monsieur, nous sommes en 2012 !/ Mouais, peut-être que vous, ça ne vous dérange pas, mais il y a des clients que ça dérange.

Les travailleurs étrangers situés au plus bas de l’échelle sociale sont bannis des espaces de loisirs. Il est impensable pour certaines personnes qu’ils fréquentent les mêmes endroits que leurs employeurs Libanais. Leur statut leur interdit toute égalité de traitement.
Malgré tout, les mentalités changent, et des affaires comme celle de l’aéroport sont régulièrement dévoilées. Elles obligent à prendre conscience que l’intégration sociale de ces émigrés est loin d’être résolue, et que leur image dans la société ne s’améliore que très lentement.

Notes de traduction : « el idara men3etone » la direction leur interdit l’entrée.

Illustration par Zina Mufarrij
Illustration par Zina Mufarrij

Notez