Diaspora albanaise : la grande oubliée des politiques

Aurenc Bebja
15 Juillet 2016



Aujourd’hui, un tiers de la population albanaise vit et travaille en dehors du pays, principalement pour des raisons économiques. Cela concernerait 1,4 million de citoyens, d’après les chiffres du ministère albanais des Affaires étrangères. Entre 70 et 75 % de cette population réside en Grèce et en Italie. Faire participer à la vie politique cette partie de la population en âge de voter semble logique, mais la réalité est toute autre.


La place Skanderbeg, au cœur de Tirana. Crédit NH53 (Flickr).
La place Skanderbeg, au cœur de Tirana. Crédit NH53 (Flickr).
Les citoyens albanais à l’étranger ne peuvent pas voter à distance. Pour autant, lors des dernières campagnes électorales (législatives et municipales), la classe politique albanaise, principalement la gauche, avait promis que la possibilité de voter à distance se mettrait en place en cas de victoire aux élections. Il s'agirait d'une sorte de remerciement pour la contribution économique et sociale que la diaspora apporte au pays.

Jusqu’à présent, ces promesses n’ont pas été tenues. Elles provenaient des dirigeants actuels du pays, c'est-à-dire le Premier ministre, Edi Rama, et le maire de Tirana, capitale albanaise, Erion Veliaj.

Erion Veliaj, maire de Tirana. Crédit Muriel Epailly.
Erion Veliaj, maire de Tirana. Crédit Muriel Epailly.
En 2009, ils se trouvaient dans deux différents partis de gauche en opposition : le Parti Socialiste et le G99. Ils ont décidé de fusionner et ont proposé de mettre en place une plateforme électorale permettant d’assurer le vote de la diaspora albanaise à distance. Selon les deux hommes : « Le vote des émigrants est un droit constitutionnel et une obligation que la classe politique doit à ses actionnaires économiques les plus importants du pays ». Cette année-là, ils n’ont pas remporté les élections.

Ils ont par la suite persisté et ont tenu ce même discours lors des élections législatives de 2013, cette fois-ci en allant plus loin dans leurs promesses. Ils avaient affirmé que le vote de la diaspora deviendrait une réalité dans les 100 premiers jours de leur arrivée au pouvoir. Ils sont arrivés au pouvoir avec une majorité écrasante, mais leurs promesses se sont envolées et depuis, ce sujet n’a plus été réellement leur priorité.

Aujourd’hui, difficile d’oublier le discours d'Erion Veliaj, qui promettait avant sa montée au pouvoir : « La possibilité de voter à l’étranger après tant d’années sera la plus grande récompense que l’on doit aux familles, aux amis et aux enfants albanais en dehors du pays. Ils sont les principaux actionnaires de notre économie. Les aides financières envoyées chaque année ont été plus importantes que les investissements étrangers en Albanie et ont maintenu la stabilité financière du pays ».

« Dites à vos proches en Albanie d'aller voter »

Summum de l’histoire, lors des élections municipales de 2015, le Premier ministre, Edi Rama, lance un appel à la diaspora albanaise via un réseau social : « Vous qui êtes en émigration, passez un coup de fil à la maison, à vos proches et amis en Albanie et dites leur d’aller voter, parce que leurs votes sont un investissement pour vous ! Merci ! ». Il n'était donc plus question de faire voter la diaspora mais de l'inciter à convaincre ses proches en Albanie de le faire.

Les élections législatives albanaises de juin 2017 pourraient être le prochain test pour que ce vote puisse voir le jour. Certains pays, proches géographiquement de l’Albanie, ont déjà testé avec plus ou moins de succès ce système de vote à distance à travers leurs ambassades : la Macédoine et le Kosovo lors de leur législatives respectives au printemps 2014, ou plus récemment la Roumanie et la Turquie. La possibilité de voter à distance existe donc bel et bien, mais la volonté se fait attendre en Albanie.

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