Édimbourg : la meilleure ville étudiante de Grande-Bretagne ?

Julie Joyeux
6 Juillet 2013



L’Athènes du Nord ne cesse d’attirer davantage d’étudiants internationaux. À un point tel qu’elle fait de l’ombre à son homologue anglaise, Londres. Le Journal international a enquêté sur les raisons de cet engouement.


Crédits photo : Saskia Heijltjes via Flickr
Crédits photo : Saskia Heijltjes via Flickr
Les quelque 20 000 étudiants français qui partent chaque année dans le cadre du programme d’échange Erasmus ont à trancher entre pas moins de 3873 établissements d’accueil. Si l’intérêt pour la Grande-Bretagne ne se dément pas, avec 20,1 % des affectations, force est de constater que le nord de l’île anglo-saxonne attire de plus en plus, au détriment du  Sud. « On m’avait dit beaucoup de bien sur cette ville [Édimbourg] ! » s’exclame Thomas, étudiant à Paris-Dauphine en 3ème année de licence de Gestion. En 2012-2013, ils sont ainsi 6750 étudiants internationaux comme Thomas à avoir jeté leur dévolu sur la capitale écossaise.
Partir en Erasmus à Édimbourg (prononcez Edinbra), c’est d’abord, bien sûr, s’intéresser à la culture britannique dans sa globalité. C’est également tirer profit de nouvelles expériences, une opportunité sur un marché de l’emploi friand des profils internationaux et débrouillards. Mais si tous les étudiants expatriés outre-Manche retirent de leur année d’échange certains bénéfices communs, Édimbourg présente quelques spécificités propres à l’Écosse, qui ont séduit plus d’un étudiant.
 

Partir loin… Mais pas trop

 « C'est marrant comme c'est si proche de la France et pourtant tellement dépaysant. » confie Marine J, partie au King’s College dans le cadre d’un partenariat avec la Sorbonne. Et l’argument vaut pour de nombreux étudiants, courageux mais pas totalement téméraires. Il faut dire que la Manche sitôt franchie, le British way of life s’impose déjà : les pubs bien sûr, lieu vénéré de tous les Anglais,  mais aussi l’English touch et les traditions culturelles dans leur ensemble. A seulement 450 km de la Sorbonne, le King’s College et l’Imperial College ont de quoi dépayser… et séduire.
 
 

« Montre-moi ton jardin, je te dirai où tu étudies »

Le parallèle entre les deux organisations de jardins et les systèmes éducatifs peut sembler baroque. Il n’en est pourtant rien. À l’image des jardins de Le Nôtre, le système scolaire français est très ordonné et classique. À l’inverse, tels les parcs dans lesquels les itinéraires ne sont pas balisés, le système éducatif anglais invite à l’exploration et à la recherche de soi.
En effet, ce dernier tend à ce que l’étudiant puisse se réaliser et s’épanouir dans ses études. Pour ce faire, les effectifs sont réduits, tant dans les amphithéâtres – maximum  200 sièges en Grande-Bretagne, quand il en manque en France pour accueillir tous les participants – que lors des tutorials (équivalents des Travaux Dirigés français), qui accueillent moins de dix étudiants. Le mot d’ordre est bien l’interaction, entre étudiants, mais également avec les professeurs. Aussi ces derniers sont-ils beaucoup plus impliqués dans la scolarité de leurs élèves et dans leur vie sur le campus. Enfin, les quinze heures de cours hebdomadaires laissent à l’étudiant tout le loisir de cultiver ses passions et d’approfondir les domaines qui l’attirent particulièrement.

Car le temps extrascolaire est au moins aussi important que les heures passées derrière un pupitre. À ceux qui trouvaient le train-train estudiantin français passionnant, trépidant, vous n’avez encore rien vu ! La vie associative anglo-saxonne n’a rien à envier à son homologue français : avec ses innombrables associations, ses sorties, ses voyages et, bien sûr, ses traditionnelles tournées de pubs, convivialité et festivités sont de mise et les amitiés se nouent rapidement. C’est même à se demander d’où vient l’image d’Épinal de l’Anglais rigide et antipathique… Les stéréotypes ont la vie dure ! Véritable microcosme sans équivalents en France, l’étudiant évolue sur le campus comme dans une petite ville, avec ses cafés, ses boîtes de nuit, ses supérettes et ses logements. Toutefois, cette description est beaucoup plus probante à Édimbourg qu’à Londres. La densité urbaine de cette dernière ne permet effectivement pas aux campus de se développer de façon extraordinaire, comme ce serait le cas d’Oxford ou de Cambridge. UCL (University College London), l’un des plus grands collèges constitutifs de l’Université de Londres, se trouve ainsi dans plusieurs bâtiments séparés, dont certains distants de plus de 4 km. Ville à dimension humaine, Édimbourg présente quant à elle des campus beaucoup moins dispersés. Et ce n’est pas son moindre avantage…

Les explorateurs en quête de brownies et du monstre du Loch Ness ne sont pas les seuls à délaisser la City pour des contrées plus sauvages. Nombreux sont ceux qui voient dans la capitale écossaise un bon compromis entre les avantages de Londres et certains impératifs pratiques.
 

Etudiants fauchés, attention please !

« Les loyers sont hors de prix », déplore Christine Scali, qui a étudié un an à Londres. Aussi, un étudiant avertit en vaut deux : vous reviendrez certes de Londres la tête pleine de souvenirs, mais le porte-monnaie passablement vide. Ce n’est pas un scoop : le coût de la vie est à Londres l’un des plus élevés du monde, « de 25 à 50 % supérieur à celui des autres métropoles » selon Marine J. Conséquence, les étudiants logent très souvent en banlieue où les prix sont plus abordables ; ils connaissent alors les joies de ces fameuses « migrations pendulaires » que mentionnent tous les manuels de géographie. 1/0 pour Édimbourg donc qui, avec des logements accessibles dès 300 £/mois, garantit à ses étudiants de pouvoir habiter à proximité immédiate du campus sans se serrer la ceinture par ailleurs. Et en effet, le coût de la vie raisonnable dans la capitale écossaise permet de dépenser ses deniers ailleurs qu’en logement… Les innombrables possibilités de sortie vous tendent les bras !
 

Sur la route…

Les idées ne manquent pas. À partir d’Édimbourg, l’Écosse et ses paysages grandioses s’offrent aux aventuriers : à 1 h 30 en bus, Saint Andrews et l’université dans laquelle William et Kate se sont rencontrés ; au Nord cette fois, c’est le monstre du Loch Ness et son lac qui attendent le visiteur intrépide ; Glasgow, première ville d’Écosse par sa taille, est à moins d’une heure par rail et par route… La proximité immédiate avec la nature invite également à la randonnée : la pratique des sports en pleine nature est l’occasion d’appréhender différemment cette contrée merveilleuse.
Que les moins aventuriers se rassurent, il n’est pas besoin de dépasser les dernières maisons d’Édimbourg pour avoir son compte d’étonnement et de ravissement. La capitale a en effet su conserver son charme et son patrimoine. Le château, la vieille ville et la résidence d’été de la reine sauront charmer les anglophiles et autres amoureux de l’histoire de la monarchie anglaise. Autre avantage majeur : la ville de 460 000 habitants étant à taille humaine, la plupart des distances se font facilement à pied ! Combiner les avantages d’une agglomération de la superficie de Montpellier avec le dynamisme d’une grande capitale a décidément de quoi séduire.

Pluviomètres débordés

Si Édimbourg partage avec Londres de nombreux avantages, la capitale écossaise présente aussi certains inconvénients similaires. Avec ses 676,2 mm de pluie par an, Édimbourg concurrence la capitale anglaise (145mm) et française (641mm). Même constat au niveau de l’ensoleillement : avec 1 406 heures de soleil par an (contre 1573 heures à Londres et 1 798 heures à Paris), n’espérez pas revenir bronzé de votre année d’étude en Écosse.
 

Le « melting-pot » anglais

Si le temps est décidément très British, les étudiants côtoyés le sont généralement beaucoup moins. Elle est passée, l’époque où l’on partait étudier en Grande-Bretagne pour fréquenter dandies en redingotes et gentlemen. Si Erasmus s’est vu décerner la médaille de la paix pour le rapprochement des cultures, il y a un revers de médaille : à Édimbourg comme à Londres, il est aussi fréquent d’entendre parler l’hindi, l’allemand ou le français que la langue de Shakespeare. « On passe donc souvent plus de temps avec d’autres français, européens ou des personnes venant d’autres continents qu’avec des étudiants locaux qui eux ont déjà leur vie et ne voient pas toujours trop l’intérêt de parler à des étrangers qui ne restent pas longtemps et qui n’ont pas un anglais parfait ! » confie Thomas. Quant à Londres, « la ville est cosmopolite et bourrée de français en particulier » (Marine J), ce qui lui vaut d’ailleurs la périphrase : le melting-pot anglais. De quoi rassurer les étudiants effrayés à l’idée de se faire remarquer par la French touch. Pour les autres, gageons que l’effort pour amadouer les Anglais saura porter ses fruits, et qu’ils se feront pleins de nouveaux school-mates.
 
 Combinant les avantages d’une ville à taille humaine et les atouts d’une capitale dynamique, Édimbourg n’a donc rien à envier à son homologue anglais, et l’affluence croissante d’étudiants internationaux semble conforter sa position en tant que destination phare. Au-delà du seul cadre de vie, rappelons toutefois qu’une année Erasmus est aussi – voire surtout – riche des rencontres qui se font et des amitiés qui se nouent, puisque, comme le souligne le slogan même du programme d’échange :
 
« Erasmus change les vies et ouvre les esprits. »

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