Grande-Bretagne : état des lieux de la monarchie

Juliette Perrot
3 Février 2015



Si certains Britanniques tournent le dos aux hommes politiques, ils sont encore nombreux à affectionner la monarchie. Alors que le prince Andrew vient d’être cité dans une affaire d’abus sexuel impliquant une jeune fille mineure, retour sur le pouvoir de la famille royale et le combat que mènent ses opposants.


Crédit Reuters
Crédit Reuters
Accusé d’avoir abusé sexuellement une jeune fille mineure, le prince Andrew a fait dernièrement beaucoup parler de lui en Grande-Bretagne. Cette affaire tombe mal pour la famille royale qui bénéficie d’une forte popularité dans le pays, perceptible lors du mariage du prince William en 2011 ou encore lors du Jubilé d’Elisabeth II en 2012. Bien que Buckingham Palace ait qualifié les allégations contre le prince de « fausses et sans fondement », certains Britanniques ont dénoncé le fait que si l’affaire avait concerné un homme politique, ce dernier aurait été contraint à la démission. Or le prince Andrew ne peut pas être démis de ses fonctions qui sont avant tout représentatives, ce qui révolte certains Britanniques qui souhaiteraient voir l’influence et le pouvoir de la famille royale diminuer.

Une famille royale toute puissante ?

Alors que la liberté de parole et d’expression est une valeur forte à laquelle sont attachés les Britanniques, le pouvoir de la monarchie est aujourd’hui de plus en plus remis en cause. Preuve que ce pouvoir est bien réel, la famille royale a récemment réussi à empêcher la diffusion sur la chaine BBC d’un documentaire la concernant. Ce documentaire révélait entre autres qu’après le décès de la princesse Diana, le palais a eu recours à des spécialistes en communication afin de regagner la sympathie des Britanniques. Face aux excellents avocats de la famille royale prêts à tout mettre en œuvre pour défendre les intérêts de la monarchie, difficile pour la BBC de ne pas faire machine arrière. 

Une certaine opacité entoure par ailleurs la famille royale concernant l’argent qu’elle reçoit, les taxes qu’elle paie ou encore la façon dont elle intervient dans les affaires publiques. Cette opacité est liée au fait que la monarchie n’est pas concernée par la loi sur la liberté de l’information, créée en 2000 par le gouvernement Tony Blair afin de permettre aux citoyens d’avoir accès aux documents administratifs d’un grand nombre d’organismes publics. En 2010, le Freedom of Information Act fut amendé, offrant une protection encore plus grande à la famille royale. Tout document concernant la monarchie est ainsi désormais inaccessible pendant 20 ans à compter de sa date de création. Impossible donc de savoir comment est dépensé l’argent public et dans quelle mesure la monarchie influence la politique du gouvernement. Au sein de la famille royale, le prince Charles est tout particulièrement accusé d’interférer politiquement et d’outrepasser son rôle constitutionnel.

C’est notamment ce qu’a affirmé en juin 2014 l’ancien secrétaire d’Etat à l’éducation David Blunkett, révélant que le prince de Galles avait tenté sous le gouvernement Tony Blair de persuader ce dernier d’augmenter le nombre de Grammar Schools, écoles qui sélectionnent les élèves en leur faisant passer des examens d’entrée. 

Le combat des anti-monarchistes

Republic est la principale organisation anti-monarchiste du Royaume-Uni. Sur son site internet, elle se déclare « en faveur d’une alternative démocratique à la monarchie ». L’organisation veut abolir la monarchie et remplacer la reine par un individu élu par le peuple, qui représenterait la nation et serait politiquement indépendant (il resterait donc bien distinct du Premier ministre). Bien que son combat soit avant tout motivé par des raisons politiques et non économiques, Republic insiste également sur le coût de la monarchie qu’elle estime à plus de 200 millions de livres chaque année. L’organisation dénonce en outre les idées reçues sur la monarchie, comme par exemple le fait qu’elle permettrait de fédérer le pays et d’attirer les touristes étrangers. Quant à ceux qui l’accuse d’être anti-patriotiques, Republic rétorque qu’elle l’est effectivement si l’on considère qu’être patriotique signifie placer les intérêts de la famille royale avant ceux des citoyens. 

A l’occasion du Jubilé d’Elisabeth II en 2012, les anti-monarchistes ont manifesté sur les bords de la Tamise en scandant des slogans tels que « citoyens et non pas sujets », « le pouvoir au peuple », ou encore « démocratie et non pas monarchie ». Menée par Republic, cette action avait pour but de montrer aux monarques qu’ils ne sont pas plébiscités par l’ensemble de la population. Certains spectateurs venus assister au Jubilé ont cependant hué les anti-monarchistes, preuve qu’une partie des Britanniques reste très attachée à la famille royale.   

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