Hongrie : Budapest, la Parisienne de l’Est

Interrail, sur les traces du rideau de fer

2 Août 2013



Trois semaines, six villes. La deuxième partie de notre tour Interrail commence avec Budapest, chic et étudiante. La comparaison avec Paris s’impose du point de vue architectural, mais la « perle du Danube » a son propre caractère. Carnet de voyage.


Château de Buda | Crédits photo -- Laurène Pérrussel-Morin/Le Journal International
Château de Buda | Crédits photo -- Laurène Pérrussel-Morin/Le Journal International
Interrail est l’occasion pour les étudiants-baroudeurs de découvrir l’Europe en payant un ticket leur assurant un certain nombre de jours de voyages. J’ai profité de cette opportunité pour partir, avec une amie et seulement deux sacs à dos, faire un tour partiel de l’Europe centrale. Un voyage sur les traces de l’histoire du Vieux Continent qui nous a permis d’appréhender les différences entre des pays bien vite regroupés sous le terme de « pays d’Europe de l’Est ».

Buda : la colline protectrice

Après la République tchèque, la Pologne et la Slovaquie, c’est la Hongrie qui nous attend. Budapest est un des passages obligés en Europe de l’Est. Le train en provenance de Bratislava dans lequel nous avons pris place quelques heures plus tôt ralentit. Il semble adapter son rythme afin de mieux admirer la « perle du Danube ». Les bâtiments, mélange d’architecture russe et européenne, scintillent au soleil.

Impatientes comme des enfants, nous sautons du train et retrouvons Flora, qui nous accueille en couchsurfing, un concept « humain » qui nous permettra de rencontrer des Budapestois. Nous pourrons dormir chez cette jeune hongroise qui passe son bac pendant notre séjour. La seule condition : partager nos expériences avec elle, tandis qu’elle nous fera découvrir sa ville.

Notre hôte habite dans le centre de Buda, moins grouillant que Pest, sur l’autre rive du Danube. Dès notre arrivée, nous partons à la découverte du château de Buda, qui offre un magnifique panorama de Budapest. Construit à partir de 1247, il a été détruit et rebâtit au gré des conquêtes de la ville par diverses armées, des Romains aux Habsbourgs en passant par les Magyars. De nouveaux travaux sont prévus pour redonner au château l’aspect qu’il avait avant la Seconde Guerre mondiale. À nos pieds, le Parlement veille sur le Danube, qui sépare les deux parties de la ville.

Pest : la fêtarde

C’est de l’autre côté du Danube que l’on trouve de nombreux monuments historiques qui font toute la richesse de la ville. Nous nous y balladons à la tombée de la nuit, en commençant par l’Andrássy út, ou avenue Andrassy, équivalent des Champs-Élysées. Classée au Patrimoine mondial de l’UNESCO, cette avenue accueille principalement des magasins de luxe. Les promeneurs nocturnes vont du touriste au Hongrois fortuné en passant par les étudiants qui la traversent pour faire la fête.

Nous suivons les groupes de jeunes pour découvrir la place Deak Ferenc, où de nombreux étudiants profitent de la fraîcheur du soir, une bière à la main. Des concerts sont organisés et donnent un air de Woodstock au quartier chic. La ville de Budapest est étudiante et dynamique : une énergie revitalisante qui explique qu’elle accueille le Sziget Festival chaque été. Nous retrouvons les amies de notre hôte sur la place Deak Ferenc pour boire quelques bières et savourer la pálinka, l’eau de vie considérée comme la boisson traditionnelle hongroise.

Faire la fête semble être une revanche sur les années de régime communiste. La révolution étudiante de 1956 n’est pas bien loin. Bien vite, la discussion avec notre hôte devient politique. Dès 2011, la communauté internationale s’est émue de la réforme de la liberté de la presse. Flora nous rappelle que la Constitution adoptée en mars dernier restreint davantage les libertés. Les jeunes manifestent pour leurs droits, mais le régime conservateur campe sur ses positions.

Du romkocsma au salon viennois

Troisième jour à Budapest. Accompagnées de notre hôte, nous montons dans le vieux métro de Budapest, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Dans un bruit de ferraille, le métro du Millenium nous mène saines et sauves d’un bout à l’autre de la ville. Deuxième plus ancien métro du continent européen après celui de Londres, il a été inauguré en 1896 pour commémorer le millénaire de la création de la Hongrie.

Nous partons à la découverte du quartier juif, vieux ghetto de Budapest. La capitale hongroise, alliée de l’Allemagne nazie, mais réputée sûre avant la déclaration de guerre, a accueilli des réfugiés juifs allemands, autrichiens et slovaques. Bien que l’occupation de la ville n’ait duré que dix mois, un tiers des Juifs de Budapest sont morts pendant la Seconde Guerre mondiale, assassinés par les miliciens du Parti des Croix Fléchés.

Au détour d’une de ces rues, nous découvrons un vieil immeuble désaffecté. C’est en son sein que se trouve le célèbre romkocsma Szimpla Kert. Les romkocsma, littéralement « bars de ruine », sont des bars cachés dans les cours des vieilles habitations de Budapest. Le Szimpla Kert, ensemble de meubles dépareillés récupérés, est le plus connu d’entre eux. S’il était initialement réputé pour son ambiance alternative, il est aujourd’hui devenu le repaire des étudiants Erasmus. Ce jour-là, on y trouve un marché de la création. On y boit un smoothie au milieu des poussettes dans une atmosphère décontractée en rêvant aux soirées bien arrosées à la bière qui y sont certainement organisées. L’endroit a un petit air de squat berlinois.

Pour finir le séjour en beauté, nous changeons d’ambiance en allant nous réfugier dans la maison Gerbeaud, pâtisserie de style viennois fondée en 1858 sur la place Vörösmarty. Ici, les personnes âgées sont légion. La bourgeoisie remplace la jeunesse bobo désoeuvrée du Szimpla Kert. Pourtant, les glaces et gourmandises, excellentes, sont beaucoup moins chères qu’en France si l’on ne prend pas en compte le pouvoir d’achat. Nous rentrons à pied. Le temps de récupérer nos bagages, la nuit est tombée sur Budapest. Après un séjour comme toujours trop court, nous quittons la belle Hongroise pour la Serbie, qui s’annonce plus débraillée. Un nouveau charme, tout autant historique.


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Laurène Perrussel-Morin
Ex-correspondante du Journal International à Berlin puis à Istanbul. Etudiante à Sciences Po Lyon... En savoir plus sur cet auteur