Maldives : nouveau président sous les tropiques

Ramalingam Va, à Chennai, traduit par Nathalie Macq
18 Novembre 2013



Après des mois de rebondissements politiques, l’archipel de l’océan Indien a enfin élu son nouveau président ce 16 novembre 2013. Abdullah Yameen est le demi-frère de Maumoon Abdul Gayoom, aussi Président des Maldives durant trois décennies. Yameen a été déclaré vainqueur de l’élection avec une faible majorité de 51,3 %.


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Afin d’être élu président des Maldives, le candidat devait obtenir un minimum de 50 % des suffrages plus un. Après l’annulation par la Cour Suprême du premier tour des élections prévu le 7 septembre, la date du 9 novembre avait été retenue. Cependant, il a été impossible de proclamer un candidat vainqueur car celui qui détenait le plus de voix, Mohammed Nasheed, n’en possédait que 47 %, ce qui n’était donc pas suffisant.

Une requête constitutionnelle a été envoyée pour qu’un candidat soit proclamé vainqueur avant le 11 novembre, mais Abdullah Yameen a demandé à la Cour Suprême un supplément de temps pour faire sa campagne : la Cour lui a accordé cinq jours de plus. Les résultats ont montré un changement de tendance de la part des citoyens : Nasheed a perdu plus de 5 % par rapport à son précédent score, alors que Yameen a récolté un nombre de vote suffisant pour gagner la compétition, 51,3%.

Démocratie ou dictature

Le président sortant Mohammad Waheed Hassan, accompagné de son épouse, s’est envolé pour Singapour, avant même de connaître le résultat des élections. La chaîne de télévision Al Jazeera a cherché à l’interroger, sa seule répondu fut « Je ne pense pas pouvoir faire grand chose d’où je suis, il y a des choses qu’on ne peut pas faire par téléphone ». En 2008, Mohammed Nasheed a été le premier président à être élu démocratiquement : il abandonnera pourtant, selon ses dires, ses fonctions en raison d’un coup d’État.

Fareesha Abdullah, électeur de 48 ans, a déclaré : « Aujourd'hui est une date décisive pour la démocratie et le futur de notre pays. Nous allons savoir si nous allons devenir une démocratie ou une dictature.»

Maumoon Abdul Gayoom est connu pour avoir eu le plus long mandat en tant que président, soit 30 ans, de 1978 à 2008. Gayoom a été désigné Président par son prédécesseur le président Igrahim Nasir. Plus tard, Gayoom évoqua l’idée d’élection présidentielle directe, une idée approuvée par un référendum public en 2007.

L’Inde à la rescousse

Les Maldives ont toujours eu de bonnes relations avec l’Inde. Durant le mandat de Gayoom, il y eut plusieurs tentatives de coups d’État. Mais, ce n’est qu'en 1988 que ces troubles politiques ont attiré l’attention de plusieurs pays voisins. C’est à ce moment là que Gayoom a demandé de l’aide à l’Inde. L’ancien Premier ministre indien Rajiv Ganghi a envoyé 1 600 troupes militaires dans la capitale des Maldives, Malé. Le coup d’État fut orchestré par un groupe de mercenaires mené par Abdullah Luthufi, et soutenu par l’Organisation de la libération des personnes de Tamil Eelam (PLOTE). Le PLOTE est un ancien groupe militaire du Tamil au Sri Lanka, qui est devenu aujourd’hui un groupe pro-gouvernemental et paramilitaire, ainsi qu’un parti politique. Les mercenaires ont pris le contrôle de plusieurs bureaux gouvernementaux et d’aéroports mais n’ont jamais réussi à capturer Gayoom.

Plus tôt dans l’année, en février, Mohammed Nasheed a encore fait parler de lui en essayant de se réfugier auprès du Haut Commissariat indien. Il a reçu un mandat d’arrêt de la Cour après avoir été accusé d’abus de pouvoir pendant sa présidence. Après presque 10 jours de controverses, Nasheed a quitté le Haut Commissariat Indien, grâce à l’intervention des autorités indiennes qui ont négocié avec lui un marché. Cependant, les détails de l’arrangement n’ont pas été rendus publics pour le moment.

L’entreprise d’infrastructure indienne GMR a aussi fait la une des journaux quand les Maldives ont rompu avec cette dernière le contrat qui allait lancer l’aéroport international d’Ibrahim Nasir. Cette rupture de contrat qui date de décembre 2012 s'est fait à l'initiative de l’entreprise qui avait l’obligation de quitter le pays dans les sept jours. L’opposition, qui a pris en main le projet après que Nasheed se soit retiré, a déclaré que ce contrat était « void an inition » (non conforme à la loi). GMR a dénoncé cette décision qu'elle considère comme un acte politique. En juin 2013, GMR a demandé une compensation financière de 1,4 milliards de dollars pour cette rupture de contrat « illégale ».

Malgré cette succession d’événements rocambolesques, le pays a enfin élu son Président. Aujourd’hui, le pays est proche de la démocratie, et est bien décidé à entretenir des relations amicales avec ses voisins.


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