Sotchi 2014, le biathlon russe dans la tourmente

30 Janvier 2014



À une semaine de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Sotchi, c’est une nouvelle dont les organisateurs se seraient bien passés. L’Union Internationale de Biathlon (IBU) a annoncé que trois biathlètes des équipes de Russie et de Lituanie ont été suspendus pour dopage.


Hier, trois biathlètes russes et lituaniens ont été suspendus pour avoir été contrôlés positifs à une substance interdite lors des étapes de Coupes du monde au Grand Bornand (Haute-Savoie) en décembre et à Oberhof (Allemagne) en janvier. Si aucun nom n’a officiellement été communiqué dans l’attente de l’analyse de l’échantillon B, cette affaire de dopage pourrait concerner Irina Starykh, 6e biathlète mondiale et l’une des grandes chances de médailles pour le pays hôte à Sotchi et Ekaterina Iourieva, championne du monde en 2008 et déjà contrôlée positive à l’EPO quelques mois après son titre. Une affaire qui fait donc tâche à une semaine des premières épreuves olympiques de Sotchi alors que l’organisation avait promis des Jeux exemplaires.

Le dopage, ce fléau russe

Depuis plusieurs années, la Russie doit se racheter une conduite en matière de dopage. En biathlon, 8 des 9 derniers cas de dopage concernent des biathlètes russes, les plus marquants étant ceux d’Olga Pyleva, déchue de sa médaille d’argent des Jeux olympiques de Turin en 2006 après un contrôle positif au carphédon ainsi que Ekaterina Iourieva, championne du monde, Albina Akhatova, championne olympique de relais et Dmitry Yaroshenko, n°2 mondial contrôlés positifs à l’EPO en décembre 2008. Les sanctions financières imposées à la fédération russe de biathlon n’ayant rien fait – le biathlon russe étant la propriété du milliardaire Mikhaïl Prokhorov – l’IBU avait alors menacé des sanctions sportives plus générales si les cas de dopage se multipliaient. De son côté, le CIO invitait les autorités compétentes en Russie à prendre des mesures d’urgences pour combattre ce fléau dans le pays. A l’approche des Jeux olympiques de Sotchi, ces menaces semblaient avoir fait effet et les performances des biathlètes russes aux championnats du monde (où les contrôles anti-dopage sont plus intenses) s’étaient d’ailleurs « mystérieusement » effondrées.

Entre 2013 et 2018, la Russie accueille certains des plus grands événements sportifs de la planète : l’Universiade en juillet 2013 à Kazan, les championnats du monde d’athlétisme en août 2013 à Moscou, les Jeux olympiques d’hiver en février 2014 à Sotchi, les championnats du monde de judo en août 2014 à Tcheliabinsk, les championnats du monde de natation en 2015 à Kazan et enfin la Coupe des Confédérations puis la Coupe du monde de football en 2017 et 2018. Tous ces événements, voulus par Vladimir Poutine, doivent contribuer à la réémergence de la Russie sur la scène internationale et être un modèle d’organisation. Mais déjà en août 2013, les derniers championnats du monde d’athlétisme à Moscou avaient d’avantage mis en lumière les affaires de dopage dans l’équipe russe que la grandeur du pays.

L’annonce de ces deux nouveaux cas de dopage ainsi que celui de la nageuse Yuliya Efimova, star des derniers mondiaux de Barcelone et d’un coureur russe qui ont également éclaté cette semaine risque donc de perturber l’organisation des Jeux olympiques de Sotchi. La Russie misait en effet beaucoup sur ses biathlètes pour décrocher de nombreuses médailles dans un sport qui est parmi les plus populaires dans le pays.

Ekaterina Iourieva | © Christof Koepsel/Bongarts
Ekaterina Iourieva | © Christof Koepsel/Bongarts

« L’histoire se répète »

Ce qu’on risque de retenir des Jeux olympiques de Sotchi, c’est une équipe de Russie dont les méthodes d’entraînement datent encore de l’URSS, où le dopage est courant et où les athlètes dépendent encore de riches mécènes. Le fonctionnement des équipes russes de biathlon a 20 ans de retard par rapport aux nations alpines et scandinaves, mais le pays parvient tout de même à figurer parmi les meilleurs mondiaux grâce à un vivier d’athlètes incomparable et l’usage malheureusement trop fréquent d’EPO. Dans le monde du biathlon, cette nouvelle affaire de dopage ne choque personne, pas même les journalistes russes : « l’histoire se répète » résument-ils avec un grand fatalisme.

L’EPO est certes le « dopage du pauvre » en comparaison avec le système organisé par certaines grandes équipes dans d’autres sports et est l’une des substances les plus facilement détectables. Il n’empêche qu’il y a un réel problème avec le dopage en Russie. L’écart entre la Russie idéalisée avec des sites de compétition ultramodernes et un système d’entraînement qui n’a pas évolué depuis les années 1980 se creuse de plus en plus.


Par Benoît Vivier

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