Tuvalu et Kiribati, les nouveaux atlantes

30 Juillet 2015



Les Tuvalu et les îles Kiribati, deux pays d’Océanie, pourraient disparaître de la carte à cause de la montée des océans que provoque le changement climatique. Le chef d’Etat des Tuvalu a récemment demandé à l’Europe, lors de sa venue à Bruxelles, de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. En Océanie, c’est tout le continent qui doit se mobiliser pour faire face à ces conséquences sans précédent.


Tuvalu. Crédit Archives AP
Tuvalu. Crédit Archives AP
L’Atlantide est-elle un mythe ? La légende perdure à travers les siècles et les générations. Mais les îles qui s’écroulent sous les eaux pourront appartenir au monde réel, d’ici peu. Les éruptions volcaniques qui font émerger des îles à la surface ont déjà prouvé que les phénomènes météorologiques créent des modifications durables pour la planète. Actuellement, c’est le réchauffement climatique qui bouleverse la Terre. Il engendre une importante montée des eaux. Cette élévation des océans s’explique notamment par la fonte des glaces. Quand la calotte glaciaire fond, ce qui est le cas puisque l’océan se réchauffe, le niveau de la mer augmente. C’est également ce qui s’était produit après la fin de l’ère glaciaire, il y a 20 000 ans de cela. D’où la volonté du Premier ministre des Tuvalu, Enele Spoaga, qui est venu à Bruxelles, de réclamer une diminution des émissions de dioxyde de carbone aux Européens.

Ces dernières années, les satellites ont enregistré une élévation moyenne globale du niveau des eaux de trois millimètres par an. Selon les données fournies par le Programme mondial de recherches sur le climat, cette augmentation est nettement supérieure à celle constatée au cours des derniers siècles. 

La surface de ces deux archipels se réduit

Crédit : AFP Phot / Torsten Blackwood
Crédit : AFP Phot / Torsten Blackwood
Situés au niveau de la mer, les Kiribati et les Tuvalu sont donc menacés d’extinction. La montée des eaux engloutit d’ores et déjà une partie de ces îles. Aux Tuvalu, le point le plus élevé atteint cinq mètres au-dessus du niveau de la mer. Une digue très faible pour faire face à la colère des océans. Ces dix dernières années, le pays a connu une perte d’environ trois mètres en front de mer. Quatrième plus petit État du monde, certains spécialistes estiment que dans 50 ans, il faudra regarder les photographies pour savoir à quoi ressemblaient les Tuvalu.

La visite du Premier ministre actuel à Bruxelles n’est pas la première demande du pays auprès des pollueurs mondiaux. En 2002, le Premier ministre en poste, Koloa Talake, avait déclaré vouloir porter plainte contre les Etats-Unis et l’Australie. Son intention était de les emmener devant la Cour internationale de justice à La Haye, pour émissions démesurées de gaz à effet de serre. Perdant les élections qui ont suivi, il n’a pas pu aller jusqu’au bout de son idée.

Aux Kiribati, les constats sont similaires. De nombreuses maisons sont régulièrement inondées. Les villageois vivent avec les eaux, tout simplement. Ce pays de 811 km² recherche activement des solutions pour envisager un avenir meilleur. Le sort funeste qui se prépare pour l’archipel l'oblige à se préparer à l’inéluctable. Le chef d’Etat du pays, Anote Tong, a acheté 20 km² du territoire des îles Fidji pour 6,4 millions d’euros. La zone est parfois nommée le « refuge des Gilbertins  », le gentilé des habitants de Kiribati. Elle servira aussi de culture agricole pour le pays. Car la seule solution sûre à ce jour, c’est bel et bien l’exode.

Y aura-t-il des réfugiés climatiques ?

Le Premier ministre des Tuvalu est clair sur un point, l’émigration n’est pas la solution. À Bruxelles, il a déclaré qu’il est possible de « relocaliser les habitants des Tuvalu dans d’autres pays, mais cela n’arrêtera pas le réchauffement climatique. Afin de sauver le monde, nous devons sauver les Tuvalu ». Ces problèmes grandissants font émerger la question des réfugiés climatiques. Un statut qui n’existe pour le moment pas, au sein du droit international. La juridiction n’a pas transmis de définition à ce sujet. Seul un projet de convention a été présenté l’an passé, afin de protéger les personnes contraintes au déplacement.

Certains habitants de ces îles du Pacifique recherchent l’asile et émigrent vers d’autres pays. Un ressortissant des Kiribati, Ioane Teitiota, avait d’ailleurs fait la demande officielle d’asile à la Nouvelle-Zélande en 2013. Il réclamait le statut de réfugié climatique au tribunal d’appel d’Auckland. Sa demande a été refusée. Pour l’heure, ce statut est donc en débat.

Accélération des catastrophes naturelles

Les marées sont plus grandes et les inondations plus nombreuses. Ces États du Pacifique affrontent des phénomènes climatiques de plus en plus forts et ravageurs. Le Vanuatu en est le parfait exemple. Frappé par un cyclone sans précédent en mars dernier, l’archipel a été dévasté. Le Président Baldwin Lonsdale avait directement attribué les causes de cette catastrophe au réchauffement climatique. Les dégâts écologiques sont lourds, et l’économie en pâtit également. Kiribati et Tuvalu font partie des dix pays où l’impact financier du changement climatique est le plus pesant.

Economiquement peu développés, pour la plupart, ces pays d’Océanie se retrouvent face à un adversaire plus puissant qu’eux. Un adversaire contre lequel on ne peut pas lutter, la Terre. Pour y faire face, il s’agit de se mouvoir en elle, de faire symbiose avec elle, en premier lieu en luttant contre la pollution. Mais ce qui crée des polémiques c’est que finalement, ce sont ces peuples du Pacifique, peu polluants, qui subissent les conséquences des pays développés. « Où ces pays vont-ils trouver l'argent ? C'est aux pays industrialisés, à l'origine du réchauffement, d'assumer leurs responsabilités », avait averti Ronald Jumeau, ambassadeur des Seychelles pour le changement climatique. En cela, l’argumentation du Premier ministre des Tuvalu à Bruxelles pourra gagner en influence.

« Dans l'espace d'un seul jour et d'une nuit terribles, toute votre armée athénienne fut engloutie d'un seul coup sous la terre et, de même, l'île Atlantide s'abîma dans la mer et disparut ». L’Atlantide est-elle un mythe ? Qu’y a-t-il de véridique sous la description de Platon ? Les Kiribatiens et les Tuvaluans se posent sûrement la question. Car si leurs îles étaient submergées, ils deviendraient des Atlantes.
 

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Diplômé en journalisme et en communication, j'ai toujours aimé écrire et filmer ce que je découvre... En savoir plus sur cet auteur